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Preure sur l’acquisition de la raffinerie d’Augusta : « C’est une chaîne de décision qui est en cause »

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L’expert pétrolier et président du cabinet Emergy, Mourad Preure, a commenté l’acquisition par le groupe Sonatrach de la raffinerie d’Augusta en Italie. Selon lui : « L’acquisition est incontestablement mauvaise, on pouvait fait mieux ». Il a estimé : « Ce n’est pas un homme ou deux, ou trois qu’il faut responsabiliser dans cette grave erreur stratégique ; c’est une chaîne de décision qui va au-delà de l’assemblée générale de Sonatrach qui est en cause et qui doit être reconsidérée ».

« Le montant de la transaction est élevé, considérant la qualité de la cible acquise (âge, état des installations, investissements à réaliser, etc.). À ce prix, on pouvait avoir mieux, sachant que le raffinage européen connaît une crise de surcapacités et que des cibles de meilleure qualité étaient et sont disponibles sur le Continent », a expliqué Preure dans un entretien paru dans le quotidien Liberté de ce dimanche 7 mars 2021

« La raffinerie d’Augusta ne peut pas traiter le pétrole algérien »

Pour M. Preure : « Sonatrach a consenti au vendeur, la filiale locale d’ExxonMobil, des facilités (enlèvement des lubrifiants sur dix ans) qui grèvent encore plus la qualité discutable de la cible. »

En outre, a-t-il expliqué : « la question essentielle est l’adéquation de l’acquisition avec la stratégie de Sonatrach, soit augmenter nos capacités de raffinage dans une logique d’intégration verticale avec pour but de satisfaire la demande nationale et valoriser notre pétrole en l’exportant sous forme de produits raffinés. »

« Il s’avère que cette raffinerie est conçue pour traiter un pétrole moyen à lourd, alors que notre pétrole est parmi les plus légers (44° API). Elle ne peut donc pas traiter notre pétrole et doit être alimentée par du pétrole moyen-oriental pour lequel elle a été conçue » a-t-il noté.

« L’acquisition est incontestablement mauvaise »

« Là, il s’agit d’une erreur stratégique discriminante. L’acquisition est incontestablement mauvaise », a-t-il commenté, en ajoutant, sur un autre registre : « le coût d’acquisition m’apparaît excessif. »

Soulignant qu’en Europe, le raffinage est en crise, l’expert pétrolier a expliqué : « Je sais que des raffineries de 5 millions de tonnes/an avec extensions pétrochimiques et facilités de stockage sont proposées à l’euro symbolique, simplement pour préserver les emplois. Près d’un milliard d’euros pour une raffinerie âgée de soixante-dix ans, je trouve que l’on aurait pu mieux négocier. Mais, plus fondamentalement, l’opportunité de cette acquisition n’aurait jamais dû franchir tous les obstacles dans la chaîne de décision tant elle n’est pas convaincante »

« Ce n’est pas un homme ou deux, ou trois qu’il faut responsabiliser »

Et d’ajouter : « Et là, ce n’est pas un homme ou deux, ou trois qu’il faut responsabiliser dans cette grave erreur stratégique ; c’est une chaîne de décision qui va au-delà de l’assemblée générale de Sonatrach qui est en cause et qui doit être reconsidérée. Le sommet de cette chaîne, sous l’autorité du chef de l’État, est le Haut-Conseil de l’énergie dont l’impérative et urgente nécessité apparaît ainsi au grand jour. »

Pour rappel, l’acquisition par Sonatrach de la raffinerie d’Augusta a été annoncée en mai 2018. L’accord de vente avec Esso Italiana, filiale italienne d’ExxonMobil, a été finalisé le 1er décembre 2018.

Sonatrach avait précisé à l’époque que « le périmètre de cette transaction inclut la raffinerie d’Augusta, les trois terminaux pétroliers de Palerme, Naples et Augusta, ainsi que les participations dans des pipelines reliant la raffinerie aux différents terminaux ».

Cette acquisition a fait couler beaucoup d’encre, tant sur le montant de son achat de 725 millions de dollars jugé exorbitant pour une raffinerie vieille de 70 ans.

Mandat d’arrêt international contre l’ancien PDG de Sonatrach Ould Kaddour

Rappelons qu’en juillet 2020, le tribunal de Bir-Mourad-Raïs  (Alger)  a  décidé d’engager une enquête pour situer les responsabilités dans l’acquisition par Sonatrach de la raffinerie d’Augusta en Italie.

La justice a placé en détention provisoire l’ex-vice-président du groupe Sonatrach Ahmed Mazighi  et  conseiller de l’ancien  P-DG  de Sonatrach  Abdelmoumen Ould Kaddour. Il  est  poursuivi pour dilapidation de l’argent public et abus de fonctions.

Le 24 février dernier, le Premier ministre, Abdelaziz Djerad, s’est exprimé sur l’affaire de l’acquisition de la raffinerie d’Augusta. Tout en annonçant que le pôle judiciaire économique et financier a ouvert une enquête judiciaire concernant l’acquisition de cette raffinerie, Djerad a fait savoir qu’un mandat d’arrêt international a été émis par le juge d’instruction à l’encontre du principal accusé dans cette affaire.

Djerad ne le cite pas nommément, mais il s’agit de l’ex-PDG de Sonatrach, Abdelmoumen Ould Kaddour, actuellement à l’étranger. Ce dernier,  était à la tête du groupe Sonatrach au moment du rachat de la raffinerie d’Augusta à la multinationale américaine ExxonMobil. Ould Kaddour avait même défendu cette acquisition.

 
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