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Démographie des entreprises : le Boom des TPE se poursuit

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Selon les statistiques du ministère du commerce que l’on peut lire sur son site internet, le nombre d’opérateurs inscrits au Centre National du Registre de commerce, serait de 1,912 millions à la fin de l’année 2017. Progressant au rythme moyen de 15% en 2017, leur nombre se situerait très probablement aux alentours de 2,2 millions, l’année suivante. Le tissu des entreprises algériennes reste de ce fait (moins de 5 années d’âge en moyenne) et largement dominé par les très petites entreprises (TPE). La très jeune histoire de l’entreprise privée algérienne et les mesures étatiques en faveur des jeunes créateurs de micro entreprises, constituent les causes essentielles de cette démographie particulière.

Répertoriées par secteur d’activités, on constate que se sont les activités de services qui ont attirés le plus de promoteurs (38%), suivies de loin par celles de la production de biens (26%). A noter que dans les activités de services les sociétés de négoce (importateurs de produits destinés à la revente en l’état) ont continué à proliférer. Plus de 820 sociétés d’importation ont vu le jour en 2017, contre seulement 120 entités orientées vers l’exportation. C’est dire à quel point le créneau des importations a continué à être attractif pour les opérateurs économiques, nombreux à l’investir en dépit des mesures de restrictions (augmentation de taxes pour 1100 produits) mises en œuvre par le gouvernement, pour juguler quelque peu la déferlante des importations. Sans grande surprise, ce sont les wilayas d’Alger, Oran, Sétif, Blida, Boumerdés, Ghardaia et Tizi Ouzou où sont enregistrées le plus d’entreprises au registre de commerce. Une étude sociologique mériterait d’être réalisée pour déterminer les raisons précises de ces spécificités régionales.

Autre signe positif, ces mêmes statistiques font état d’une baisse significative des radiations du registre de commerce, par rapport à celles des années précédentes. Une baisse sans doute due à la suppression du Crédoc qui faisait obligation de l’obligation de payer selon cette seule formule les produits importés. Une formule inadaptée qui avait, on s’en souvient, causé la fermeture de nombreuses sociétés avant que le gouvernement ne l’abroge en 2014.

Détaillant la nature des créneaux choisis par les nouveaux inscrits au Registre de Commerce, les chiffres du ministère indiquent une large préférence pour la distribution au détail (plus de 2700 inscrits), suivie des services (14.300), la production de biens (3800) et la distribution en gros (1650). Les algériens continuent donc à préférer les activités de services, notamment le commerce, plutôt que celles de la production, sans doute à cause des blocages bureaucratique et des taxations excessives auxquelles les entreprises industrielles sont soumises. Environ 95% des entreprises émargeant au Registre de Commerce sont des Très Petites Entreprises, couramment désignées sous les vocables de TPE ou de micro-entreprises. Ce sont des entreprises de moins de 10 salariés et dont le chiffre d’affaires ne dépasse guère 100 millions de dinars. Au-delà de ces chiffres l’entreprise change de dénomination pour devenir au gré de l’importance de ces indicateurs, des PME, des entreprises de taille intermédiaire (ETI)  ou des grandes sociétés (GE). Ces trois dernières catégories d’entreprises ne dépasseraient guère 150.000 (environ 5% du total des entreprises déclarées), ce qui est dérisoire. Un chiffre qui cependant témoigne  de la jeunesse des entreprises privées algériennes, qui ne sont venues aux affaires, pour les plus âgées d’entre elles, que depuis l’ouverture économique des années  1990, le privé étant pratiquement interdit durant les deux décennies de régime socialiste.

Le boom démographique des entreprises privées trouve son origine dans diverses causes, parmi lesquelles on peut citer la présence de capitaux familiaux thésaurisés durant les années socialistes et qui ont trouvé une raison d’être avec l’ouverture économique de la fin des années 80. De nombreuses sociétés familiales ont vu le jour à cette époque et, pour certaines, progressé pour devenir des entreprises d’envergures. D’autres se sont constituées à la faveur des offres publiques que l’Etat avait lancé dès la remonté des prix du pétrole du début des années 2000, à l’effet de doper la croissance et redonner vie à une économie moribonde qui peinait à se remettre de la crise économique des années 90. A la faveur de cette remontée du brut, l’Etat distribuera également beaucoup d’argent aux jeunes qui souhaitaient créer leurs propres entreprises et cet élan d’aide continue à ce jour. Il a favorisé la création de près de 250.000 micro entreprises dont une bonne partie ne résistera malheureusement à l’épreuve des résultats de gestion.

Autre facteur, et non des moindres, ayant boosté la démographie des entreprises privées : le boum des importations résultant de l’accord d’adhésion de l’Algérie à la zone de libre échange euro-méditerranéenne conclu en 2003. Dopée par les pétrodollars l’Algérie s’était alors orientée vers le tout-importation, ouvrant ainsi la voie à la constitution de plus de 50.000 sociétés de négoce qui importaient chaque année entre 35 et 40 milliards de dollars de marchandises et équipements divers. Comme le montrent les statistiques du ministère du commerce cette dynamique ne s’est pas estompée à ce jour en dépit des mesures de restrictions mises en œuvre par le gouvernement pour réduire les importations.

Il reste à toutes ces très jeunes entreprises à trouver les moyens et l’énergie nécessaires pour échapper à la sélection naturelle que ne manqueront de provoquer la concurrence et la restriction de l’offre publique que garantissait jusque là un Etat financièrement à l’aisance. Le déclin des recettes pétrolières va contraindre l’Etat à être moins présent sur le terrain économique. Toutes les entreprises qui vivaient de l’offre publique et des activités de sous-traitance devront désormais apprendre à gérer sous contrainte et de façon solidaire au risque de disparaître.

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