AccueilInterviewsAbdelhak Lamiri, expert en économie : « Il faut centraliser les...

Abdelhak Lamiri, expert en économie : « Il faut centraliser les opérations de transferts de fonds et mettre des doubles boucles de contrôle »

Date:

Dans cet entretien, l’expert en économie, M.Lamiri donne son avis sur l’impact de la contestation populaire sur l’économie du pays. Selon lui, l’économie peut reprendre si les décisions prises vont dans la bonne direction.

Il réagit notamment sur les alertent concernant le détournement de l’argent public et sur le transfert illicite estimant qu’il faut centraliser les opérations de transferts de fonds et mettre des doubles voir des triples boucles de contrôle afin d’éviter l’épuisement de nos réserves de change.

 

Algérie-Eco : Le mouvement populaire arrive à sa sixième semaine. Quel impact sur l’économie du pays?

MLamiri : L’impact des changements brutaux et des révolutions sur la sphère économique est bien connu et bien documenté : c’est la fameuse courbe en U. au début il y a une décélération de la croissance et si la situation dure une baisse de l’activité économique, due aux incertitudes et à la baisse des investissements. Il ne faut pas paniquer ; cette situation est tout à fait normale. Les pouvoirs économiques doivent tranquilliser ; et surtout il est du devoir de chacun de donner des versions optimistes sur l’évolution de la situation afin de sécuriser les consommateurs et les investisseurs sur l’évolution de la situation économique à long terme. Tant que la situation politique n’est pas stabilisée, il faut s’attendre à des perturbations économiques et une stagnation puis baisse de l’activité. Par la suite, l’économie peut reprendre si les décisions prises vont dans la bonne direction.

S’il y a changement quelles sont les priorités pour le développement économiques du pays?

Si la situation politique est stabilisée il faut alors définir les priorités et opérer un ordonnancement des réformes. Il est très facile de se tromper de bonne foi lorsqu’on évoque cette situation. Même si on met en place des systèmes de lutte contre la corruption efficace cela aide mais ne garantit pas la réussite économique. Les réformes doivent commencer par la réorganisation de l’état. A cet effet, il faut constituer cette institution d’intelligence et de prospective qui doit produire un plan stratégique ouvert, concerté et cohérent. On doit privilégier la qualité de l’éducation, le recyclage des ressources humaines, l’investissement dans la science, la recherche et développement et les industries du savoir. Ce n’est qu’après que l’on va développer l’économie productive diversifiée. Il y a des dizaines de décisions à prendre (voir mon ouvrage : la décennie de la dernière chance qui décrit toutes les décisions à prendre en vue d’un redressement durable). On sait aujourd’hui comment développer un pays. Mais c’est le système politique qui en général bloque le processus du développement. On doit savoir séparer les décisions techniques de choix politiques. A chacun son métier.

Certaines parties comme les avocats alertent sur le détournement de l’argent public et sur le transfert illicite. Quel commentaire faite-vous dans ce sens?

Bien sur que nous avons à vivre une situation très difficile. Beaucoup de personnes se sentent menacées et essayent de transférer le maximum de ressources à l’étranger pour sécuriser leur avenir. Mais si l’on construit une bonne économie, les investissements ne manqueront pas de se développer dans notre pays et contribuer à sa croissance s’ils sont bien canalisés. Il faut donc être vigilant durant cette période pour éviter une fuite des capitaux pour causes d’incertitudes économiques et politiques. Cela se produit dans tous les pays ou il y a une révolution. Ce que nous vivons s’apparente bien à une révolution. Il faut centraliser les opérations de transferts de fonds et mettre des doubles voir des triples boucles de contrôle afin d’éviter l’épuisement de nos réserves de change qui, pour le moment, constituent la seule sécurité dont nous disposons pour faire fonctionner l’économie encore trois ou quatre ans.

Articles associés

Derniers articles