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Les producteurs africains de pétrole les plus engagés sur la voie de la diversification économique

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Avec les exportations de pétrole brut qui leur permettent de plus ou moins faire face à leurs besoins budgétaires, de nombreux pays africains exportateurs ont, pendant longtemps oublié de diversifier leurs économies. Mais avec la crise de 2014 qui a vu les cours mondiaux perdre plus de la moitié de leur valeur, l’ensemble de ces pays ont affronté les conséquences de leur dépendance à la rente pétrolière : effondrement des recettes publiques et des investissements, morosité économique et inflation. 

Les pays exportateurs de pétrole du Moyen-Orient et d’Afrique ont perdu plus de 340 milliards $ entre 2014 et 2015, soit 20% de leurs PIB cumulés. Ainsi, ils ont, pour la plupart, mis en place, dans l’urgence, des politiques de diversification de l’économie pour essayer d’amortir le choc. Tour d’horizon de ces politiques chez les principaux exportateurs africains.

Nigéria : plein gaz sur le secteur agricole (pourvu que ça dure !) : De mi-2014, juste après le début de la dégringolade des cours mondiaux de l’or noir à fin 2015, le Nigéria a espéré le miracle d’un retour à la normale du marché. Mais avec des prix du pétrole toujours bas et qui plombaient de plus en plus l’économie, il fallait réagir.

Début 2016, le gouvernement annonce qu’il se passera des revenus pétroliers pour financer le budget fédéral de cette année. Un comité interministériel est installé pour élaborer en urgence une pile de politiques de relance de l’activité agricole. « Si nous redressons l’agriculture, nous redresserons l’économie. », avait assuré le vice-président Yemi Osinbajo.

Le gouvernement encourage la production rizicole pour réduire les dépenses d’importation annuelles de nourriture qui s’élèvent à 20 milliards de dollars, le riz étant l’un des produits les plus importés par le pays. Avec l’inflation, le sac de riz importé se vend désormais 20 000 nairas (63 dollars) contre 8000 quelque mois plus tôt. Les plans concernent également la relance du secteur huile de palme. Le pays en était le premier exportateur mondial dans les années 60, devant les leaders asiatiques du marché.

D’un autre côté, le gouvernement porte un intérêt particulier à l’agro-industrie et promet des mesures d’accompagnement et de facilitation aux investisseurs locaux. Une volonté affichée par le gouvernement qui a suscité l’intérêt de plusieurs investisseurs dont le tycoon Aliko Dangote. Comme le précise Le Point, le milliardaire a investi dans une usine de concentré de tomate et a annoncé un investissement de près de 4 milliards de dollars dans la production rizicole et le sucre. 200 000 hectares de terres sont mobilisés pour le riz et 350 000 hectares sont en cours de mobilisation pour la culture de la canne à sucre, avec une usine de transformation.

Hélas, depuis début 2017 et la remontée progressive des prix du pétrole, le Nigéria donne l’impression de ranger une fois de plus au placard ses ambitions agricoles. Actuellement, on entend très peu parler des projets agricoles annoncés par le gouvernement, notamment celui de la relance du secteur cacao. Au plus fort de la crise, le pays avait décidé d’augmenter ses parts de production dans la balance mondiale, qui étaient de 8%.

Angola : mines, agriculture et pêche pour soigner l’addiction à l’or noir : Comme le Nigéria, l’Angola a attendu début 2016 pour se lancer dans des projets de diversification économique. En juin, le président Eduardo dos Santos a déclaré : « l’Etat angolais est à court de réserves de change pour payer la facture de ses importations parce que la société publique en charge du pétrole n’a pas contribué à renflouer les caisses publiques depuis janvier 2016. ». Il a ajouté que le pays se prépare à lancer des projets pour renverser la tendance et relancer l’économie. Dans les mois qui ont suivi cette annonce, les projets se sont structurés autour du secteur minier, l’agriculture et notamment la pêche.

Le gouvernement appelle à une hausse des investissements dans le diamant, les roches ornementales, le fer, l’or, le phosphate, et d’autres minéraux qui devront servir de moyens d’épauler la diversification de l’économie nationale.

Dans ce sens, Luanda a lancé le programme d’appui à la production, la promotion des Exportations et à la substitution des Importations (PRODESI). A travers ce programme, le pays se donne jusqu’à 2020 pour attirer d’importants investissements dans le secteur agricole et profiter de son potentiel pour augmenter sa production halieutique de 16% à 614 000 tonnes.

Dans la foulée, le gouvernement a décidé de se doter de bateaux de pêche spécialisés, d’un nouveau port avec entreposage frigorifique à Tombwa, pour un budget estimé à 23,5 millions de dollars. Si, les analystes estiment que la pêche ne se substituera pas à l’huile qui assure 70 % de ses recettes fiscales, ils applaudissent les retombées que pourraient en tirer les finances publiques et le budget. Dans l’intervalle les cours mondiaux du pétrole tutoient les 90 dollars le baril et le nouveau pouvoir reste engagé pour la diversification économique. 

L’Algérie : un plan qui exprime une forte envie de diversification : Troisième producteur africain de pétrole et premier pour le gaz naturel, l’Algérie a lancé un vaste programme de diversification dénommé « Le nouveau modèle de croissance ». Le programme dont l’exécution s’étalera jusqu’en 2030, vise à limiter les dépenses publiques à 58,8 milliards d’euros par an jusqu’en 2019 et à réduire le déficit budgétaire, de son taux de 20% du PIB en 2015, à 1,9% d’ici 2019, indique Maghreb Emergent.

Pour réaliser cet objectif, le pays devra enregistrer un excédent commercial de 2,2 milliards de dollars, poursuit notre source. L’Etat devrait ainsi voir son assiette de recettes hors hydrocarbures s’élargir de 11% par an jusqu’en 2019.

Selon le plan tel que détaillé par le ministère des finances et rapporté par la presse locale, « la contribution du secteur manufacturier au PIB devrait par exemple passer de 5,3% en 2015 à 10% en 2030. Les activités commerciales devraient afficher une augmentation de 7,4% au cours de cette période, suivies de près par l’agriculture, dont on attend une hausse de 6,5%. Le secteur du BTP, un des piliers de l’économie algérienne, devrait enregistrer une progression plus mesurée, avec une croissance attendue de 1,7% par an. ». Par ailleurs, l’Algérie devrait susciter l’éclosion d’une forte industrie de l’agro-alimentaire et du phosphate avant 2030.

Gabon : le seul qui avait déjà entamé sa diversification : Avant le début de la chute des prix du pétrole, le gouvernement gabonais s’était résolument engagé dans la construction d’une économie moins dépendante des hydrocarbures. Le pays était donc l’un des mieux préparés, dans la région centrale du continent, pour faire face aux affres de la crise. Avec son plan de relance économique (PRE), le Gabon, quatrième producteur d’huile du continent, s’est très tôt donné les moyens pour réaliser de gros investissements dans le domaine de la production d’huile de palme. Cette niche qui joue un rôle de premier plan dans le PRE est, aux yeux du président Bongo, le pilier de la diversification et la porte de sortie idéale du tout-pétrole. 

Le Gabon possède avant tout un potentiel important dans le domaine agricole et compte attirer des investissements pour le mettre en valeur. L’année dernière, le pays a attiré des investissements de plus de 230 millions $ de la Banque africaine de développement (BAD) et une enveloppe de 700 millions $ pour accélérer la mise en exécution de son plan, notamment dans le domaine de l’agriculture. D’autres niches comme le caoutchouc sont explorés actuellement par les autorités. Ces efforts ont été salués par les institutions de Bretton Woods et de nombreux économistes dont le banquier d’affaires Lionel Zinsou. Reçu en audience par le président Bongo en mai 2017, ce dernier déclarait : « Le Gabon est tout à fait particulier. On monte en valeur ajoutée. On s’abstrait petit à petit de la dépendance au pétrole. … Le Gabon a entrepris des diversifications très prometteuses dans les domaines du bois et de l’agriculture, parce qu’ils ont des effets d’emploi, de sécurité alimentaire et de réduction des importations alimentaires ».

Le gouvernement a, en outre surtout déployé d’importants efforts pour instaurer une meilleure gouvernance financière et en réduisant les dépenses et le train de vie de l’Etat.

Ecofin

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