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Mohamed Toumi : « Nous n’avons pas les bonnes pratiques de consommation »

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Mohamed Toumi est directeur exécutif au sein de la Fédération algérienne des consommateurs (FAC). Dans cet entretien, il dresse un portrait sur le comportement du consommateur algérien durant le Ramadan. Par la même occasion, il commente la cherté des prix des fruits et des légumes dans les marchés, et il émet une série de recommandations pour les citoyens.

Le citoyen algérien adopte un comportement de consommation particulier durant le Ramadan. Ce comportement a-t-il changé pour autant ? Quelles sont les spécificités de Ramadan 2018 ?

Il n’y a aucune modification par rapport aux Ramadans précédents. A l’approche de chaque Ramadan, le consommateur s’affole pour s’approvisionner alors que nous avons toujours conseillé d’éviter de stocker les produits alimentaires, qui sont au final périssables. Au lieu de stocker des produits comme les tomates et les pommes de terre, il est préférable d’acheter selon les besoins.

Entre le 4 et le 5 mai, nous avons organisé la première édition de l’université du printemps dans la wilaya de Saida lors de laquelle plusieurs recommandations ont été faites. Nous avons, par exemple, demandé au ministre du Commerce de créer un institut national de la consommation. Ce dernier, qui existe dans les pays développé, et récemment en Tunisie, servira de baromètre pour les pouvoirs publics, mais aussi les citoyens, afin de mesurer la température (du marché) et de faire des études comparatives de produits et de services. En somme, un outil d’aide à la prise de décision.

En tant que fédération protectrice des consommateurs, comment vous agissez concrètement sur le terrain pour sensibiliser les citoyens ?

Nous agissons par le biais de campagnes de sensibilisation que nous lançons chaque année. Pour la campagne nationale de l’année en cours, elle a été lancée le 12 mai dernier, et durera jusqu’à la fin de la saison estivale. Elle mettra en avant la rationalisation (de la consommation), et luttera contre le gaspillage des produits alimentaires, notamment le pain et le lait. Il faut savoir que le pain est le premier concerné par le gaspillage, suivi par le lait en sachet et les boissons gazeuses. A ce titre, les producteurs de boissons s’enrichissent durant le mois de Ramadan.

Comment l’Algérien se comporte durant le ramadan ?

C’est l’anarchie ! Nous avons toujours demandé dans nos recommandations de désigner une seule personne, au sein d’une famille, pour faire les approvisionnements. A titre d’exemple, le pain, la zalabiya et kalb louz sont des produits que nous consommons quotidiennement durant le ramadan. Imaginez lorsqu’il s’agit d’une famille composée de six personnes adultes, qui rentrent tous à la fin de la journée avec trois baguettes de pain. Ils se retrouveraient avec 18 baguettes  alors qu’au moment de la rupture du jeun ils ne peuvent consommer que deux à trois. Nous, les familles algériennes, sommes désorganisées.

Les Algériens deviennent  extrêmement dépensiers durant le mois sacré, A votre avis pourquoi ?

Nous avons fait une étude dans ce sens et nous avons trouvé que les dépenses du consommateur algérien lors du mois de Ramadan représentent trois fois le salaire du chef de famille, quel que soit le niveau de sa fonction. Certaines familles s’endettent pour consommer.

Mais pourquoi au juste…

C’est un manque de culture de consommation. Nous n’avons pas les bonnes pratiques de consommation. Toutefois, nous sommes en train de préparer le guide du petit consommateur en collaboration avec l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Ce guide, qui est en cours d’édition, sera visé par le ministère de l’Education national et celui de la Santé. Il sera distribué dans les établissements scolaires pour inculquer les bonnes pratiques aux élèves. Le but étant que ces derniers orientent leurs parents.

On parle de gaspillage, mais également de la malbouffe, avec les conséquences que l’on connait. Que recommandez-vous ?

Il y’a une surconsommation durant le mois sacré. Les gens mangent jusqu’à ce qu’ils aient une indigestion. Pour cela, nous avons mené des campagnes même auprès des imams pour donner des prêches à ce sujet. Mais, le consommateur algérien est dur. Le seul moyen c’est de sensibiliser les enfants, qui pourront à leur tour, sensibiliser leurs parents.

Comment vous expliquez la cherté des prix des fruits et des légumes qui perdure, sept jours après le début de ce mois sacré ?

C’est à l’Office nationale interprofessionnel des légumes et des viandes (ONILEV) de réguler le marché et non au ministère du Commerce. Si nous arrivions à réaliser des chambres froides pour stocker les produits durant la grande saison, elles serviront de régulateur de marché quand nous en aurons besoin.

En Algérie, chaque année c’est la même chose. Et si nous avions le climat froid de l’Europe du nord où il neige à longueur d’année, nous mourrions ? Tant qu’il n’y aura pas les grandes surfaces, les centres de distribution et les chambres froide, le problème persistera.

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