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Commerce extérieur : « une limitation excessive des importations peut de facto créer des situations inflationnistes importantes »

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Dans cet entretien, M. Souhil Meddah, analyste financier et directeur général de RMG Consulting, est revenu sur le régime des licences d’importations imposé par l’Etat sur une large gamme de produits, ainsi que sur l’éventuel impact de ces restrictions sur l’économie nationale.

Algerie-eco.com : Le gouvernement a décrété des restrictions drastiques en matière de commerce extérieur, en limitant les licences d’importation. Cependant, le gouvernement a décidé récemment de libérer des marchandises importées qui sont bloquées dans les douanes. Qu’est-ce qu’a motivé cette décision?

M. Souhil Meddah: Le rôle des pouvoirs publics à travers le recours à une politique de limitation des importations en instaurant des licences limitées dans le volume et dans la durée se traduit par la volonté de maintenir les réserves de change à des niveaux préalablement visés et aussi dans un souci à moindre degré de protéger l’industrie locale naissante.

Or que dans le cas présent, il s’agit des produits qui sont d’abord réceptionnés au niveau des ports et entreposés sous douane, exposées ensuite à des risques de surcoût et de péremption probables (produits alimentaires).  Un tel statut ne favorise aucune des parties concernées, ni pour l’opérateur qui a déjà une opération d’importation en cours domiciliée et partiellement réceptionnée, et pour laquelle il doit supporter les frais généraux supplémentaires, suivi d’une  probable hausse des coûts / prix, ni même pour l’administration fiscale qui enregistre un différé de paiement sur les droits de douane ( fiscalité ordinaire ).

Depuis l’instauration du régime des licences d’importation, le gouvernement n’a eu cesse d’élargir ces licences. Diriez-vous que ce régime est une opération insuffisamment préparée?

Le système économique mondial est basé sur le principe des échanges, pour nous étant une économie qui doit entretenir des relations commerciales avec le reste du monde, notre souci majeur c’est de savoir comment maîtriser les véritables leviers capables de faire basculer les balances des échanges en notre faveur dans certains cas et aussi de plafonner notre dépendance dans d’autres cas. Ce n’est pas en misant sur une gestion du stock des réserves que les ratios économiques vont progresser mais plutôt dans le captage des opportunités d’exportation ou de répondre aux besoins locaux en misant sur la chaîne des valeurs à partir de nos ressources et de nos capacités.

D’autre part la hausse ou la baisse des importations sont issues d’une suite logique de la demande sur le marché, entre produits importés avec les produits locaux disponibles et de qualité ou ceux qui ne sont pas disponibles du tout.

Peut-on dire que les licences d’importation ont eu un impact positif sur l’économie?

D’un point de vue analyse, une bonne partie du PIB, serait également alimentée par les opérations d’importation, qui touche directement ou indirectement les facteurs d’emploi, de consommation ou de services. Donc les licences d’importation ont et auront un impact sur la gestion financières de la trésorerie extérieure, mais sur le plan des indicateurs économiques seul le passage vers une productivité globale dédiée selon les capacités et les spécialités est capable de répondre à ce besoin. Car une limitation excessive des importations peut de facto créer des situations inflationnistes importantes.

L’Algérie a eu recours par le passé à ce type de régime, appelé « Autorisation Global d’Importation » (AGI). Quelle est la différence entre les deux politiques?

L’utilité de cet ancien régime qui date des années 1970, était destiné à répondre aux besoins d’une gestion précise pour une période donnée ou le secteur public se positionne en première force avec un système économique dirigé et planifié. Ces conditions n’existent plus. Actuellement notre économie est plus libéralisée et le marché devient l’acteur le plus exigeant. Le défi majeur se situe dans le rôle de chaque acteur économique (entreprise, administration, institution, consommateur …etc.) pour orienter la balance en faveur et en défaveur de notre modèle de croissance et de besoin.

Pensez-vous que le régime des licences va compromettre l’adhésion de l’Algérie à l’OMC?

Il existe des règles d’admission des licences non automatiques pour les membres de l’OMC, Ce régime doit être transparent entre membres, simple et prévisible, en limitant les effets de restriction des importations.  Il doit aussi s’argumenter selon la nécessité de protéger ou non une situation économique donnée (production naissante, conjoncture économique… etc.). Nous devons donc nous conformer à ces impératifs en misant sur la balance entre nos capacités intérieures si elles existent et la demande nationale en produits et services.

L’instauration des licences d’importation risque-t-elle de provoquer des pénuries et de l’inflation?

Une limitation d’approvisionnement en matières et équipements depuis l’extérieur doit obligatoirement être compensée par un approvisionnement local de ces matières et équipements. Le passage par une licence d’importation est un acte administratif instantané qui ne tient pas compte ni des capacités ni des qualités des produits locaux de substitution. Parmi les effets automatique ressentis, il y’a le phénomène de pénurie des produits ayant des demandes considérables régulières, qui enregistre dans son passage un déséquilibre entre l’offre local avec la baisse de la cadence extérieure provoquant quelques périodes de pénuries et des hausses des coûts avec. Cela se traduit ensuite par une tendance inflationniste directe qui s’alimente sur la base de cette hausse des coûts et aussi des opportunités spéculatives naissantes à partir des pénuries intermittents.

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