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Algérie : Le financement non conventionnel à l’origine de la hausse des prix ?

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Depuis quelques semaines, le consommateur algérien a constaté une hausse importante et durable des prix des produits destinés à la consommation. La hausse des prix s’est généralisée et l’inflation galopante touche beaucoup de produits.

Le financement non conventionnel, communément appelé la planche à billets, engagé fin 2017, est-il à l’origine de la hausse des prix ?

Présenté par l’ancien premier ministre, Ahmed Ouyahia, comme la panacée aux problèmes de financement de l’Etat, le recours à la planche à billets pourrait être à l’origine de l’inflation.

Dans un point de situation sur le financement non conventionnel établi le 1er avril 2019 et publié sur le site de la Banque d’Algérie, cette dernière dit avoir été contre le recours à la planche à billets.

La Banque d’Algérie a affirmé, dans sa note d’avril 2019, dans laquelle la Banque centrale est revenue sur les circonstances de la mise en œuvre du financement non conventionnel, avoir soulevé le caractère « inflationniste » de ce genre de financement.

« La Banque d’Algérie ne peut pas intervenir directement sur le marché primaire des émissions d’obligations du Trésor, via des opérations de quantitative easing. Cela reviendrait à créer de la monnaie ex-nihilo (en d’autres termes, recourir à la planche à billets ) pour le financement du déficit du Trésor. Une telle option risque d’entraîner l’économie dans une spirale inflationniste et de dépréciation de la monnaie nationale, fortement dommageable », avait précisé la Banque centrale.

Depuis la mi-novembre 2017 et à fin janvier 2019, un montant de 6.556,2 milliards de DA,
a été mobilisé par le Trésor, auprès de la Banque d’Algérie, au titre de la mise en œuvre du financement non conventionnel.

« Au total, sur le montant global mobilisé à ce jour, de 6.556,2 milliards de DA, seul
un montant de 3.114,4 milliards de DA, a été injecté dans l’économie », avait précisé la Banque d’Algérie.

Le financement non conventionnel résulte de la création monétaire ex-nihilo, de l’émission de monnaie par la banque centrale, sans contrepartie en termes de marchandises et de services, ce qui risque de provoquer une hausse des prix des marchandises existant sur le marché, notamment si la production nationale n’a pas suivie. En effet, une émission excessive de la monnaie par rapport à la production peut expliquer la hausse des prix.

Toutefois, la dépréciation du dinar peut également expliquer la hausse des prix notamment des produits importés qui sont plus chers en raison de la baisse de la valeur du dinar. La loi de Finances 2021 avait annoncé une baisse du dinar sur trois années consécutives. Elle se basait sur une valeur moyenne de 142,2 dinars pour un dollar en 2021, 149,31 dinars en 2022 et 156,78 en 2023. Le premier ministre et ministre des Finances, Aymen Benabderrahmane, a indiqué, hier lundi, lors de la présentation du projet de loi de Finances 2022 devant les membres de la commission des finances et du budget de l’APN, que la valeur du dinar s’est contractée de 6,1% face au dollar américain en 2021.

Par ailleurs, le gouvernement prévoit, dans le projet de loi de Finances pour l’exercice 2022, un taux d’inflation de 3,7%.

Commerçant spéculateur : Le coupable idéal

L’explication de la hausse des prix par les manœuvres spéculatives engagées par certains commerçants en recourant au stockage semble simple et séduisante. Les marchandises se font rares sur les étals ou deviennent de plus en plus chères. Les produits sont retirés de la commercialisation à des fins spéculatives.

On était habitué à constater la hausse des prix à l’occasion du mois de Ramadan, des fêtes de l’Aïd ou à la rentrée scolaire. Mais cette fois, la hausse des prix s’est installée et elle est partie pour durer dans le temps. Cette situation intenable à long terme dénote l’incapacité du gouvernement à réguler le marché.

Obstiné dans sa démarche de mise à l’index des commerçants spéculateurs, le gouvernement a examiné, lors de la dernière réunion du conseil des ministres du 17 octobre, un projet de loi sur la lutte contre la spéculation.

A cet effet, le président Tebboune a ordonné la révision du Code pénal, pour imposer une peine maximale allant jusqu’à 30 ans de prison et la réclusion à perpétuité pour les personnes impliquées dans le crime de spéculation.

Convaincu de tenir le coupable idéal à l’origine de la hausse des prix des marchandises, le ministère du Commerce a donné aux propriétaires d’entrepôts jusqu’au 30 novembre pour déclarer leurs entrepôts, sous peine de sanctions rigoureuses.

En juillet dernier, le Directeur général de la régulation et de l’organisation des marchés au ministère du Commerce, Sami Kolli, a indiqué que le ministère du Commerce envisageait d’imposer l’usage de la facture ou du bon de livraison. Ces deux documents commerciaux, qui garantissent la traçabilité des produits, sont boudés par les agriculteurs et éleveurs.

Fin du financement monétaire et flexibilité du taux de change

Si le financement non conventionnel permet à l’État de disposer de liquidités immédiates pour financer son déficit budgétaire, cela a des conséquences négatives sur le porte-monnaie des ménages et détériore le pouvoir d’achat.

L’Algérie a besoin d’un grand plan d’investissement pour produire des richesses matérielles qui garantissent une vie décente aux Algériens. Cela passe par une libéralisation de l’économie au lieu d’une gestion étatiste qui se confirme jour après jour et par la levée des contraintes et entraves administratives et législatives.

Une refonte du système bancaire et financier s’impose pour faciliter le financement de l’économie. L’État doit également réduire son train de vie en baissant les dépenses de fonctionnement qui ne cessent d’augmenter d’année en année.

Dans le projet de loi de Finances pour l’exercice 2022, le gouvernement prévoit des recettes budgétaires de 5.683,22 milliards de DA contre des dépenses de 9.858,4 milliards de DA.

Le Fonds monétaire international (FMI) a confirmé les craintes de la Banque d’Algérie. En effet, le FMI s’est inquiété de la situation macroéconomique en Algérie au point de recommander l’abandon du financement monétaire, afin d’endiguer l’augmentation de l’inflation.

L’institution de Bretton Woods a indiqué que la politique budgétaire expansionniste a contribué à porter les déficits extérieurs courants à des niveaux élevés. Cette politique a également entraîné de vastes besoins de financement qui ont été satisfaits à travers la banque centrale.

Le FMI avait préconisé une plus grande flexibilité du taux de change et un resserrement de la politique monétaire permettra d’endiguer les pressions inflationnistes.

Inflation et politique monétaire non conventionnelle à l’échelle mondiale

l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a indiqué, en septembre dernier, que les prix mondiaux des produits alimentaires ont rebondi rapidement en août, en raison d’une forte augmentation des cours internationaux du sucre, du blé et des huiles végétales.

À l’échelle mondiale, notamment dans les pays avancés et dans les pays émergents, la reprise économique post-confinement s’est accompagnée d’une forte accélération de l’inflation, en raison de la reprise de la demande.

De nombreux pays tels que les États-Unis, les pays membres de l’Union européenne ou encore le Japon, avaient annoncé des plans de relance pharaoniques pour limiter la récession économique induite par les mesures sanitaires.

La Banque centrale européenne, la Réserve fédérale américaine (Fed) ou la Banque du Japon ont eu recours à la planche et à des mesures de politique monétaire non conventionnelles pour financer ces plans de relance. Ces mesures ont provoqué une accélération de l’inflation et une partie non négligeable de cet argent déversé a été absorbée par les places boursières, autrement dit par la spéculation.

D’autres facteurs peuvent également expliquer la hausse des prix au niveau mondial. Les phénomènes climatiques comme les intempéries ou la sécheresse ont impacté les récoltes de certains produits comme le café ou le blé, provoquant ainsi des pénuries. La hausse des coûts du fret maritime et la rupture des chaînes d’approvisionnement peuvent également expliquer la hausse des prix.

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