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Souhil Meddah : « Le prix actuel du baril n’a pas encore atteint le seuil d’équilibre pour absorber le déficit budgétaire »

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Le premier ministre et ministre des Finances, Aymen Benabderrahmane, a déclaré, lors de la présentation du plan d’action du gouvernement devant les membres du Conseil de la Nation (Sénat) que l’Algérie ne recourra pas à l’endettement extérieur ni à la planche à billets. L’expert financier et directeur général du cabinet RMGC Advice & Solution, Souhil Meddah, nous apporte son éclairage.

Algérie-Eco : Le premier ministre a déclaré que l’Algérie ne recourra pas à l’endettement extérieur ni à la planche à billets. Dans ce cas, quelles sont les alternatives qui s’offrent à l’État algérien pour faire face au déficit ?

Souhil Meddah : La question du recours à l’endettement extérieur doit se poser dans un cadre contextuel précis, car sur un plan macroéconomique, les pouvoirs publics en excluant tout recours à un endettement soit dans un cadre bilatérale ou par appel sur les marchés financiers internationaux, implique de facto, une mobilisation directe de nos réserves de change, avec des flux sortant à sens unique dans les compartiments qui dépendent de la balance des paiements.

La présente contextualisation s’impose du fait que les mouvements enregistrés dans les flux des différents compartiments de la balance des paiements entre balance commerciale et les soldes du compte capital, demeurent comme des effets indirects des politiques économiques qui impactent les flux sur les soldes extérieurs.

De façon plus précise, un endettement qui s’inscrit dans le compartiment du solde du compte capital peut favoriser un flux entrant en monnaie extérieure, entraînant une hausse sensible de la valeur du dinar, si dans le cas où le stock de la monnaie national ne bouge pas et ne provoque pas de nouvelles émissions. Mais ce flux engage à terme, un retour par des flux sortant équivalant aux valeurs remboursement majorées de leurs intérêts.

Cette configuration structurelle de financement ne peut se tenir en équilibre que dans le cas où chaque flux sortant émane d’un revenu entrant en devise, c’est-à-dire avec rendement et équilibre sur la balance commerciale ou à fortiori sur de nouvelles souscriptions d’emprunt, c’est-à-dire un flux sortant contre un autre entrant, pour garantir un équilibre partiel sur le solde du compte capital et sans bénéficier d’une amélioration sur la balance commerciale.

Ceci nous explique la retenue des pouvoirs publics de ne pas recourir à un endettement extérieur, pour l’unique raison que les indicateurs qui assurent l’équilibre sur remboursement en engageant de nouvelles ressources en devises ne sont pas encore visibles sur le moyen et le long terme.

Au plan microéconomique, le message des pouvoir publics sur un recours à l’endettement extérieur pour les besoins des projets d’investissement ne peut se concrétiser qu’à la condition d’impliquer l’engagement des opérateurs économiques, qui sont appelés à consolider leurs efforts pour pouvoir développer leurs modèles d’investissement, la quantité et la qualité de leurs produits de façon efficiente et compétitive, pour permettre d’abord d’améliorer le niveau des exportations en Hors Hydrocarbures. En comblant d’abord, le solde de la balance commerciale, pour aboutir finalement sur des ressources plus performante au niveau des soldes du compte capital.

En conclusion, les alternatives pour faire face aux besoins extérieurs, pour le moment ne sont pas nombreuses. Elles ne peuvent évoluer et se maximiser que dans le cas où les opérateurs économiques s’engagent pour soutenir les flux sur les revenus des exportations et de fait, sur la balance commerciale ou si d’autre part nous aurons des flux importants en IDE entrants supérieurs aux engament versés par des transferts de dividendes, dans les revenus primaires sortants du des soldes courants.

La réduction des importations et la rationalisation des dépenses sont-elles un moyen suffisant ?

La volonté de réduire des importations s’appuie généralement sur une politique protectionniste tarifaire ou non tarifaire. Actuellement, les pouvoirs publics optent pour une politique protectionniste non tarifaire, qui ne peut pas dépasser le temps qu’il lui faut. Au fur et à mesure que le temps passe, les pouvoirs publics seront contraints soit de s’aligner sur des pratiques protectionnistes non tarifaires pour faire jouer la compétitivité au profit de la production locale de substitution, limitée uniquement pour les besoins du marché local, ou de s’ouvrir directement sur une politique de libre échange, tout en comptant sur les réactions du marché et sur l’apport que doit prendre en charge l’espace marchand et productif des opérateurs économiques.

Le recours à la planche à billets est-il inéluctable ?

Cette question reste intimement attachée aux effets conjoncturelles sur le plan ressources extérieures, qui de facto vont générer ou non des évolutions sur les ressources intérieures (fiscalité pétrolière et fiscalité ordinaire indexée sur la pétrolière). Dans les deux cas, il faut commencer par estimer le coût nécessaire pour les besoins de la politique budgétaire en investissement et en fonctionnement.

Le prix actuel du baril n’a pas encore atteint le seuil d’équilibre pour absorber le déficit budgétaire. Il est clair que l’option de rationalisation des ressources et de l’optimisation des dépenses, sont des éléments fondamentaux qui jouent en faveur d’un équilibre budgétaire forcé, mais cette option s’appliquera toujours au détriment d’une croissance, qui jusqu’à ce jour, est dépendante de la commande publique et de l’État comme principal ordonnateur de la sphère macroéconomique.

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