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Plan d’action du gouvernement, pouvoir d’achat… les explications de l’expert financier Souhil Meddah

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L’expert financier et directeur général du cabinet RMGC Advice & Solution, Souhil Meddah, est revenu, dans cet entretien sur le plan d’action du gouvernement, présenté lundi dernier par le premier ministre, Aymen Benabderrahmane, devant les députés et sur l’inflation que connaît le pays depuis quelques semaines.

Algérie Eco : Le premier ministre a présenté lundi dernier le plan d’action du gouvernement qui a été adopté par l’APN jeudi. Que pensez-vous de ce plan d’action, notamment le volet économique : amélioration du climat des affaires et de l’attractivité, intégration du secteur parallèle, réforme du guichet unique, investissement, réforme bancaire (ouverture de 30 agences bancaires/an. Quel est l’intérêt de cette mesure ?

Souhil Meddah : Il est clair que le plan d’action présenté s’inscrit d’abord face à une situation conjoncturelle qui implique un stress économique sur la scène nationale. Dans les cinq chapitres présentés et développés, nous remarquons que les points exprimés s’articulent sur deux axes clairs, qui sont à la fois de reconfiguration du tissu économique et aussi de correction de trajectoire par rapport aux effets constatés sur les politiques antérieures.

Le premier axe de reconfiguration, s’annonce de façon lointaine, notamment sur les volets de révision ou de modernisation du système bancaire, dans ses aspects techniques pratiques et aussi de capacité. Il devient aussi notable de revenir sur la proposition de l’élargissement de la taille de ce secteur, à travers l’ouverture de plusieurs agences bancaires, qui exprime implicitement une vision d’intégration de plus d’agents économiques ( surtout des petits porteurs de la base ) dans l’espace financier, par sa démocratisation, sa naturalisation, sa numérisation, sa disponibilité pour tous, mais aussi de par les spécialités sectorielles confondues aux positions géographiques dans lesquelles cet élargissement sera concrétisé. De façon plus explicite, le système financier qui à la base compte sur les indicateurs d’un marché microéconomique, ne peut s’élargir sans tenir compte des potentielles mobilisations, sur les activités factuelles marchandes et non marchandes, les demandes sur les crédits, les dépôts, l’épargne et aussi, sur le rôle des effets de levier réalisables pour certaines spécialités sectorielles qui impliquent des règles de fonctionnement, de rémunération et d’avantages que les politiques de l’État imposent.

L’amélioration de l’attractivité du climat des investissements est un passage important dans le sens d’un meilleur cadrage législatif et règlementaire, surtout vis-à-vis de la stabilité des textes législatifs, de pratiques institutionnelles et de la segmentation sur la gestion du foncier industriel, agricole, touristique et urbain. Il est aussi de reformer le fonctionnement et les attributions du guichet unique qui doit s’élargir horizontalement, pour offrir une meilleure assistance aux promoteurs d’investissement. Cette action s’inscrit aussi dans les reformes structurelle à moyen termes, par rapport à l’extension du champ de présence des opérateurs qui auront à leur charge d’alimenter les futures modèles de croissance.

Le rôle de la diplomatie économique ne sera performent à long terme qu’en comptant en amont sur un tissu industriel qui permet de dégager des quantités suffisantes pour alimenter le marché intérieur en même temps que les autres marchés extérieurs. Il doit aussi compter et en aval sur un secteur de logistique et de transport très bien équipé avec une réglementation monétaire flexible et adaptée pour accompagner faciliter toutes les opérations d’exportation.

Le deuxième axe est confondu entre données conjoncturelles et autres structurelles pratiques. Dans ce sens, l’intégration du secteur informel, qui dans sa vraie définition est inclut dans le secteur formel, sauf qu’il échappe à tous contrôle à partir des points de passage du cycle économique, ne peut se concrétiser qu’à travers des mécanismes d’amélioration du contrôle et de la consolidation fiscale entre agents économiques ( operateurs, consommateurs, institutions et autres ) et aussi, par une généralisation des instruments de paiements scripturaux adaptés pour garantir une meilleure lisibilité et traçabilité des échanges entre agents.

La dépénalisation de l’acte de gestion est aussi un sujet qui doit trouver son issue rapidement, ce qui permettra de débloquer certaines décisions sur les affaires du foncier, du financement, des projets, des règlements des dettes envers les opérateurs. Il permettra aussi des ouvertures sur les lancements des participations sur capitaux propres ou des placements sur les titres de créances… etc.

A la veille de la rentrée sociale, l’effritement du pouvoir d’achat des ménages persiste. Le plan d’action du gouvernement est marqué par l’absence de mesures en faveur du pouvoir d’achat. Que pensez-vous ?

Il ne faut pas s’attendre à un effort supplémentaire émanant de la politique budgétaire de soutien. Les questions du pouvoir d’achat sont intimement liées à trois facteurs importants. Le revenu, qui ne peut être garanti que par l’emploi des personnes et le plein emploi dans le cadre macroéconomique. Ceci impliquera d’abord l’État qui doit relancer son instrument budgétaire par la commande publique, couplé à une politique monétaire qui garantit la compétitivité locale d’une part et la stabilité des prix d’autre part (soit localement ou en importation). Ensuite, les subventions qui dans une mesure exceptionnelle, vont s’ajuster avec des mesures d’affectation directe. A mon avis, il est plus important d’activer sur la qualité des produits pour insister les gens à consommer moins avec des prix proches du réel, que de procéder à un système de rémunération directe qui techniquement est très difficile à mettre en place. Et enfin, les prix à la consommation, qui subissent des fluctuations incontrôlées sur la base de données inexpliquées. Cet espace a besoin d’une politique de régulation et de contrôle très performante.

Comment expliquez-vous la spirale inflationniste que vit l’Algérie depuis quelques semaines ?

La hausse du taux d’inflation est souvent constatée pour deux raisons, soit l’augmentation des revenus avec une hausse des prix qui s’en suit, soit par rapport à une dépréciation de la valeur de la monnaie, qui pour des raisons d’équilibre des masses, provoque des hausses de prix généralisées. Il est utile de rappeler que l’année 2020 était caractérisée par un ralentissement exceptionnel d’une grande partie de l’activité économique durant plus de six mois et, il y a eu quand même une hausse du SNMG et l’abattement des bases imposables en dessous de trente mille dinars. Sauf si d’autres analyses prouvent autres choses, mais les deux facteurs se sont intimement heurtés en provoquant sur une durée glissante d’un an des effets sur la valeur du dinar comme instrument d’ajustement et le niveau de l’inflation comme indicateur qui reste maitrisable dans sa configuration macroéconomique (en dessous des 8%). Le problème se pose beaucoup plus dans un ordre de détail, c’est-à-dire le pouvoir d’achat des ménages qui subissent des hausses disproportionnées par rapport aux facteurs macroéconomiques de la même époque.

Est-ce que la planche à billets participe en partie à cette inflation ?

C’est une hypothèse qui reste très peu probable. Si c’était le cas, il y’aurai eu une inflation beaucoup plus importante depuis 2018 à ce jour. Il faut savoir que contrairement aux hausses des revenus et des prix qui agissent sur le marché de la demande du détail, les réserves du financement non conventionnel ont été beaucoup plus affectées vers les compartiments institutionnels et sectoriels qui traitent par voie scripturale entre les comptes (en écritures). La part de la masse fiduciaire dans ces compartiments est vraiment minime. En plus le financement non conventionnel est venue pour compenser les postes de demandes qui eux-mêmes étaient potentiellement convertibles en dettes financières.

La Banque d’Algérie a tenu récemment à faire une mise au point sur la liquidité bancaire. La banque centrale dit avoir relevé dans plusieurs articles de presse, un amalgame récurent, entre la notion de liquidité bancaire qui apparait dans la situation monétaire mensuelle de la Banque d’Algérie, et la liquidité fiduciaire. Quelle est votre analyse ?

La liquidité bancaire est composée au passif du bilan de l’ensemble des valeurs qui circulent dans le cercle financier à travers toutes ses masses, par contre la part de la liquidité fiduciaire qui appartient aussi au passif du bilan de la BA, est incluse à l’intérieur des masses de la liquidité générale. Elle reflète un instrument d’échange physique par utilisation en billets de banque et en monnaie divisionnaire, qui est injectée sur le marché en fonction des demandes enregistrées ou prévues. Le niveau des valeurs fiduciaires qui varie en fonction des demandes quotidiennes des agents économiques (operateurs et consommateurs ou ménages). Cette part fiduciaire distribuée sur la place des banques primaires doit être inférieur au niveau de la liquidité totale.

A la première lecture de ce qui est communiqué par la BA, ce rebondissement du niveau des liquidités entre 521 MDS au 30 avril 2021 à 1296 MDS au 15 septembre 2021, peut s’expliquer par les effets qui ont suivi la reprise d’après 2020 avec une accélération ressentie entre les trois trimestres de 2021. Notons aussi que la troisième vague du COVID n’a pas vraiment impacté le rythme des échanges marchands et financiers entre agents.

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