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Vers la fin du schiste en 2020 ? La question fait débat aux Etats-Unis

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Depuis 2014, le marché du pétrole est devenu très volatil. Ce qui a énormément fragilisé les économies des pays producteurs. Le gaz a, quant à lui, entamé une importante dégringolade depuis l’année dernière. Les combustibles ont souffert d’une surabondance de l’offre en provenance des Etats-Unis qui sont devenus, grâce à la fracturation hydraulique, le plus important producteur de pétrole du monde. La production gazière n’est pas en reste, avec une augmentation de plus de 70% entre 2005 et 2018. Mais cette technique de forage controversée à cause de sa dangerosité pourrait être interdite avec l’arrivée d’un président démocrate aux affaires, cette année. L’abandon ou non de la fracturation hydraulique est au cœur d’un débat national qui oppose démocrates et républicains.

Grâce à la fracturation hydraulique qui a entraîné le boom du schiste, les Etats-Unis occupent aujourd’hui la tête du peloton des plus gros producteurs de pétrole du monde, avec un rendement quotidien d’environ 12 millions de barils. Trois ans plus tôt, avant le départ du président Barack Obama, la production était d’environ 9 millions de barils par jour. Mais les choses ont vite changé avec l’arrivée au pouvoir du président Donald Trump pour qui les engagements climatiques passent après les enjeux économiques. L’objectif était clair : inonder le marché de pétrole afin d’affaiblir l’emprise de l’OPEP sur la régulation du marché et des prix. Cela devrait faciliter la reprise industrielle qui était une promesse de campagne du candidat républicain.

Trump fait pression pour plus de forages de combustibles fossiles et moins de réglementations environnementales. Depuis 2016, les mesures de protection de la faune, des eaux souterraines et de la qualité de l’air ont été réduites par le gouvernement américain. Les résultats sont très vite au rendez-vous. En 2018, les Etats-Unis, autrefois importateurs nets de pétrole, en sont devenus exportateurs nets, grâce à une exportation de 3,2 millions de barils par jour et 5,8 millions de barils par jour de produits pétroliers, estime l’Agence internationale de l’énergie (AIE).

En quatre ans, la nouvelle industrie pétrolière des Etats-Unis est devenue tellement puissante que ses perspectives inquiètent les défenseurs de la nature. L’AIE a prévu qu’avec le rythme de développement actuel, la production américaine de pétrole de schiste devrait plus que doubler, d’ici 2025, et 61% de la nouvelle production de pétrole, à partir de la décennie qui commence, viendra des Etats-Unis. Les craintes liées aux dangers de ce boom nourrissent un débat qui pourrait aboutir, ou non, à la fin de la révolution du schiste. 

Qu’en pensent les détracteurs du schiste ? Si la fracturation hydraulique a fait croître la sécurité énergétique et baisser les prix de l’énergie aux États-Unis, les griefs à son encontre sont de plus en plus nombreux. Un sondage en ligne a d’ailleurs révélé que 48 % des Américains sont favorables à la fracturation et 52 % y sont opposés. La bataille est lancée et les partisans de chacun des camps brandissent davantage d’arguments pour faire pencher la balance de leur côté.

La production effrénée d’énergie aux Etats-Unis a énormément affecté l’équilibre déjà fragile de la protection environnementale. Rien qu’entre 2016 et 2018, les émissions de gaz à effet de serre provenant de la production américaine de pétrole et de gaz naturel ont augmenté de 13 %, selon une étude de l’Université de Columbia aux Etats-Unis. Pour ce qui est du torchage du gaz issu de la production de schiste, il a augmenté de 48 % entre 2017 et 2018, selon la Banque mondiale.

Une autre étude a estimé que la production de gaz de schiste en Amérique du Nord (Canada y compris) pourrait être la source de plus de la moitié de l’augmentation des émissions mondiales de combustibles fossiles au cours de la dernière décennie. Il convient de noter que les Etats-Unis et le Canada sont les principales zones où la fracturation hydraulique est pratiquée.

Dans le cadre de la fracturation, il faut savoir que 69 % des études sur la qualité de l’eau ont révélé un potentiel élevé de contamination, 87 % des études sur la qualité de l’air ont révélé une pollution atmosphérique importante et 84 % des études sur les risques pour la santé humaine ont révélé des signes de dommages ou de dommages potentiels. 

Selon l’Université de Columbia, l’eau utilisée lors de la fracturation et qui contient des produits chimiques, du sel et des matières radioactives (qui se trouvent naturellement dans le schiste) revient à la surface pour polluer le sol et les cours d’eau.

Ces eaux usées, également appelées saumures, contiennent souvent des niveaux élevés de radium, ce qui expose les travailleurs en amont, les chauffeurs de camion qui manipulent la saumure et les déchets, et potentiellement le public, à des substances cancérigènes.

Par ailleurs, une étude menée en 2017 par l’Université de Chicago a révélé que les bébés nés à moins d’un kilomètre des sites de fracturation ont plus de chances (+25%) d’avoir un faible poids à la naissance, ce qui les rend plus vulnérables à la mortalité infantile, à l’asthme et aux difficultés d’apprentissage.

Pour l’instant, les chercheurs ne savent pas si la cause est la pollution de l’air ou de l’eau, l’exposition à des produits chimiques ou la pollution.

Un rapport sur les effets du boom du gaz de schiste dans les Appalaches au début des années 2000 a révélé que la pollution de l’air était à l’origine de 1200 à 4600 décès prématurés. En décembre 2019, un pic de cas rares de sarcome d’Ewing chez les adolescents et les jeunes adultes, dans deux régions de forte production au sud-ouest de la Pennsylvanie, a suscité une enquête publique. C’est un cancer des os qui s’attaque en substance aux enfants et aux jeunes adultes.

Bon pour l’économie américaine : Selon une simulation réalisée en 2015, l’expansion de la production américaine de pétrole et de gaz, due à la fracturation hydraulique, a créé 1,5 million d’emplois sur les 10 dernières années. Elle a également stimulé la fabrication d’équipements et la demande de matières premières telles que l’acier.

Sous l’administration Trump, les permis de forage sur les domaines publics ont augmenté de 300%. En 2019, les recettes du ministère de l’Intérieur provenant de la location de domaines publics aux compagnies pétrolières et gazières et de la collecte de redevances ont atteint 12 milliards de dollars. C’est deux fois plus qu’en 2016.

Ces revenus sont reversés au Trésor fédéral, aux Etats et aux tribus amérindiennes. Le gouvernement américain a récemment fait savoir que l’argent du schiste permet de financer les écoles, les services publics et d’autres projets sociocommunautaires importants.
Selon des chiffres de l’American Petroleum Institute (API), l’un des régulateurs du secteur pétrolier dans la fédération, une interdiction de la fracturation entraînerait la perte de 7,3 millions d’emplois américains, d’ici 2022 ; une augmentation de 900 milliards de dollars de la facture énergétique des ménages jusqu’en 2030 et une perte de 7000 milliards de dollars pour l’économie américaine, d’ici 2030.  D’ailleurs, préoccupé par les mesures qu’un nouveau président démocrate pourrait prendre contre la fracturation, l’API envisage de dépenser un million de dollars dans une campagne publicitaire qui vantera les produits de la fracturation comme des solutions de lutte contre le changement climatique. Mais, selon Romany Webb, un spécialiste des questions environnementales à l’Université de Columbia, il peut y avoir d’autres moyens pour un président de décourager la fracturation. Le dirigeant, poursuit-il, pourrait augmenter les taux de redevance de l’exploitation du schiste dans les domaines publics. Cela rendra la production plus coûteuse pour les compagnies et des modifications pourraient être apportées à la loi sur la propreté de l’eau ou de l’air afin de réglementer plus strictement les rejets de l’industrie.

Ecofin

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