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Élection présidentielle: L’impasse de l’autoritarisme

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Plus on approche de la date du scrutin présidentiel fixé depuis une caserne au 12 décembre 2019 et plus les difficultés organisationnelles s’amoncellent et la résistance populaire monte en puissance et le fait savoir en faisant barrages à toutes les tentatives de soutien à ce vote qui ne brille ni par la qualité des candidats en lice ni par la transparence du scrutin confié à des virtuoses de la fraude.

Les ripostes des populations de Constantine, Annaba, El Tarf, Tébessa, Biskra, El Oued, Djelfa et autres contrées du pays, donnent déjà la mesure de l’hostilité des algériens à ce scrutin imposé par l’état major militaire. Une hostilité qui ira crescendo et qui se rependra très certainement dans tout le territoire algérien. Les réactions populaires sont, pour l’instant, restées pacifiques en dépit des réactions musclées des forces de l’ordre, mais on ne peut gager qu’elles le restent éternellement si la voie de la répression reste la seule réponse de la partie qui tient à organiser cette élection à n’importe quel prix.

La campagne électorale qui va très bientôt s’ouvrir, va certainement forcer les candidats à la présidentielle et ceux qui les soutiennent, à tenter des sorties publiques, mais elles seront très périlleuses. Les forces de l’ordre ne pourront pas sécuriser tous les meetings et campagnes publicitaires qui se tiendront sur un territoire aussi vaste que le notre. La détermination de l’écrasante majorité des algériens à leur faire barrage rendra leur tâche encore plus ardue, pour ne pas dire, impossible à accomplir. Effectuer le forcing électoral de cette manière est un pari perdu d’avance. Il ne fera qu’exacerber les tensions politiques et sociales qui pourraient engendrer de très graves dérapages, dont les auteurs devront en  assumer la lourde responsabilité.

On s’attend par ailleurs aux mêmes réactions populaires dans les pays d’émigration où les urnes seront boudées et très probablement empêchées de diverse manières. Là aussi des risques de violences qui pourraient venir des fonctionnaires des ambassades et consulats algériens, pourraient discréditer l’élection aux yeux du monde, quand bien même quelques électeurs zélés parviendraient à glisser leurs bulletins de vote dans les urnes. La crédibilité d’un vote se jugeant sur la qualité du déroulé du processus électoral, il est à craindre que l’élection du 12 décembre soit d’avance entachée d’irrégularités qui entacheront pour longtemps son crédit. Aucun pays démocratique ne s’aventurera à marcher dans la combine, même si de réels intérêts sont en jeu.

Dans ce bras de fer qui oppose depuis bientôt neuf mois le peuple qui manifeste son désaccord à ce vote forcé et l’état major qui tient à sa feuille de route autoritaire, le rapport de force est à l’évidence du coté du peuple algérien qui détient la puissance du nombre et la légalité constitutionnelle. Le choix de la contestation pacifique mais déterminée, ne change rien à la nature du rapport de force, même si, le résultat escompté sera plus long à atteindre. Les manifestants du hirak expriment du reste clairement, cette intention (manach talguine, koul djemaa khardjine) à chacune de leurs sorties.

En dépit du matraquage médiatique opéré par les chaînes de télévision et radios aux ordres du haut commandement militaire, peu d’algériens ont adhèrés aux thèses du pouvoir. Les techniques de manipulation étant trop grossières, les algériens ont préféré se tourner vers les réseaux sociaux et les chaînes de TV acquises au Hirak. Seule la peur suscitée par les incarcérations arbitraires et la répression policière parvient pour l’instant à tempérer les ardeurs des manifestants, mais depuis cette dernière semaine, un début de radicalisation s’opère sous nos yeux dans de nombreuses contrées du pays. Rien n’indique qu’elle va s’arrêter de si tôt. Bien au contraire, le décor d’une protesta plus massive semble résolument planté. Les grèves et les manifestations populaires pouvant prendre diverses formes, ont déjà commencé. Elles sont appelées à se multiplier et à se massifier, jusqu’à la date du scrutin et certainement, après cette échéance si aucune solution acceptable n’est proposée par l’état major, en grande partie, responsable, de cette crise.

À moins d’un mois du scrutin présidentiel imposé par l’état major militaire, il est évidemment difficile de prévoir l’issue de la crise politique qui enfle et devient de plus en plus dangereuse au fur et à mesure qu’on approche de l’échéance. L’anxiété s’exacerbe face à l’autisme et au jusqu’au-boutisme suicidaire du pouvoir. Les prochains jours seront déterminants. L’issue à la crise ne saurait déroger au principe de la souveraineté populaire réclamée par des millions d’algériens. Quoi de plus légitime, en effet, que de réclamer l’application des articles 7 et 8 qui accordent au peuple le droit d’organiser comme il le souhaite, son avenir politique ? Les détenteurs du pouvoir exécutif doivent s’y résoudre au nom de la Constitution qui fixe, on ne peut plus clairement, les droits et devoirs de chacun. Il est par conséquent temps de mettre fin à cet autoritarisme stérile qui a, non seulement, fait perdre un temps précieux qui aurait dû être consacré à cette transition démocratique que réclame le peule, mais aussi et surtout, mis le pays dans une périlleuse impasse politique. Il est donc temps d’aller vers un dialogue direct avec les animateurs du hirak car sans eux aucune issue à la crise ne sera possible. C’est à ceux qui détiennent la réalité du pouvoir de les inviter à la table des négociations en leur garantissant, évidemment, la sécurité.

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