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Aïd El Adha, rentrée sociale : Des milliers de travailleurs sans salaires depuis des mois

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À quelques jours de la fête de l’Aïd El Adha et à un mois de la rentrée sociale, des milliers de travailleurs d’entreprises dont les patrons sont en prison pour des affaires de corruption, se retrouvent sans salaires depuis plusieurs mois. Et ce malgré les promesses du gouvernement de sauvegarder ces postes d’emplois et ces outils de production.

En effet, depuis la mise en oeuvre par la justice de l’opération anti-corruption, une des revendications du mouvement populaire qui a débuté le 22 février dernier, plusieurs hommes d’affaires et hauts-responsables et anciens responsables de l’entourage du clan de l’ex-président déchu Abdelaziz Bouteflika, se sont retrouvés en prison pour des faits de corruption.

Depuis le mois d’avril, les hommes d’affaires les plus en vue sur la scène nationale ont été tous jetés à la prison d’El Harrach, à commencer par le patron de l’ETRHB, Ali Haddad, les Kouninef propriétaires de Kougc, Issad Rebrab, patron de Cevital, les patrons des usines de montage de véhicules, Mahieddine Tahkout (TMC), Mourad Oulmi (Sovac), Ahmed Mazouz (Cherry) et Larbaoui (KIA).

L’arrestation de ces hommes d’affaires a impacté directement leurs entreprises dont certaines sont complètement à l’arrêt, la matière première bloquée au port (pour les usines de montage de véhicules notamment), les comptes bancaires gelés et les employés envoyés au congé forcé.

Quelques semaines après les arrestations, les premiers à ressentir l’impact sont les travailleurs des ces entreprises qui ont depuis observé des sit-in de protestation pour réclamer la sauvegarde de leur gagne-pain.

Pas plus loin que lundi, les travailleurs du groupe ETRHB venus de différents chantiers du centre du pays, ont organisé un sit-in devant la direction générale de l’entreprise à Dar El Beida (Alger), pour exprimer leur colère et réclamer la protection de leurs postes d’emploi.

Selon le journal Liberté de mardi, l’un des représentants des travailleurs, rencontré sur place, a affirmé que l’action vise surtout à attirer l’attention des pouvoirs publics sur le désarroi que vivent les travailleurs de l’ETRHB.

La même source a précisé que les travailleurs du groupe sont sans salaires depuis trois mois et les chantiers à l’arrêt. Un chauffeur de l’entreprise, a confié à Liberté que « cela fait plus de vingt jours que nous n’avons pas de carburant pour nos camions ». En plus de pénaliser les travailleurs du groupe, cette situation ne permet pas, a précisé encore la même source, d’assurer le paiement des charges fiscales et parafiscales de la Cacobatph, de la CNAS et les charges d’exploitation. Ce sont au total 15 000 employés de l’ETRHB (en 2018) qui sont sous la menace du chômage.

Il y a quelques jours, ce sont 1022 travailleurs d’un chantier du groupe ETRHB et de l’usine de montage de véhicules de l’autre homme d’affaires en détention Mahieddine Tahkout, qui ont été contraints au congé annuel forcé à Tiaret, avait indiqué à l’agence officielle l’inspecteur du travail de la wilaya de Tiaret, Saïd Lakehal, qui a expliqué que cette solution était « provisoire aux problèmes rencontrés par les deux sociétés ».

Les travailleurs de plusieurs autres entreprises touchées, ont observé des sit-in, à l’instar des employés de l’usine de montage de véhicules Volkswagen de Sovac à Relizane, les employés de Kougc etc.

A cela s’ajoute, les petites entreprises qui gravitent autour de ces grands groupes, qui risquent elles aussi de mettre la clé sous la porte, faute de marchés.

Les promesses du gouvernement

Si le gouvernement a promis depuis juin dernier de prendre les mesures nécessaires pour la sauvegarde des postes d’emplois et l’outil de production, et en particulier des entreprises dont les patrons sont en prison. Force est de constater que trois mois plus tard, rien n’a été fait ou annoncé.

Lors d’un conseil interministériel présidé par le premier ministre Noureddine Bedoui, il a été décidé de la mise en place d’un organe gouvernemental chargé du suivi des activités économiques et de la préservation des outils de production et des postes d’emploi, en présence des ministres des Finances, de la Justice, de l’Industrie, du Commerce, des Travaux publics, et des Ressources en eau, ainsi que du Gouverneur de la Banque d’Algérie et du Vice-président de l’Association professionnelle des Banques et des établissements financiers (ABEF).

Lors de cette réunion, il a été procédé à la présentation d’un exposé détaillé sur les mécanismes juridiques visant la préservation de certaines entreprises économiques souffrant de difficultés sur le terrain en raison des mesures conservatoires, à travers la mise en place d’un organe multi-sectoriel, présidé par le ministre des Finances, lequel sera chargé du suivi et de la proposition de mesures pratiques pour la préservation de ces entreprises et de leurs postes d’emploi.

Une rentrée sociale qui s’annonce très chaude 

Dans un récent entretien accordé au Soir d’Algérie, l’économiste Smail Lalmas a tiré la sonnette d’alarme quant à la crise économique qui guette le pays.

« Les gens ne commercialisent plus leurs productions, il y a un retour de production et ça va conduire à la liquidation des postes d’emplois. Ça a déjà commencé, mais le taux de chômage va encore prendre davantage d’ampleur, personne n’en parle actuellement, car le mouvement populaire fait l’actualité, mais la situation va bientôt dégénérer et le gouvernement ne peut pas agir car il n’a ni de vision ni un plan de sauvetage« , a estimé Smaïl Lalmas.

Si, selon l’économiste, la situation n’est pas due au Hirak, et que les arrestations récentes des patrons des grandes entreprises, impliqués dans des affaires de corruption, ont eu un impact sur le taux de chômage, il a expliqué que « le gel des grands projets, décidé en 2018 a impacté négativement les entreprises qui travaillent autour de ces projets et qui se retrouvent sans marchés, ni preneurs pour leur production», dit-il. « Cette situation repousse les investisseurs, il n’y a pas d’investissements, pas de création d’emplois, cette situation va encore aggraver les choses d’ici quelques jours voire quelques mois », a-t-il analysé, rappelant que le pouvoir d’achat des Algériens est déjà érodé et le citoyen a du mal à boucler les fins de mois.

L’économiste a préconisé le changement du gouvernement pour gérer la situation actuelle, en proposant quatre préalables pour booster l’économie du pays, à savoir une équipe compétente, de la crédibilité, de la confiance, un plan de sauvetage, ainsi qu’une vision et une stratégie.

Selon lui « nous avons tous les ingrédients d’une crise sérieuse qui va fortement impacter le front social à la rentrée, qui s’annonce difficile« , estimant que « nous allons finir l’année 2019 avec des recettes fiscales et des impôts très diminués, la cadence des bénéfices va reculer ». « Pour combler notre déficit, et en l’absence de change et l’option d’imprimer des billets pour compenser d’une façon artificielle nos recettes budgétaires, le gouvernement va recourir à la dévaluation du dinar», a-t-il dit.

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