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Dévaluation du dollar: Une difficulté de plus pour notre économie

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Comme le malheur n’arrive jamais seul, à l’érosion de nos réserves de change qui n’en sont plus qu’à 7O milliards en cette fin du mois d’avril 2019, est venue s’ajouter une forte dévaluation du dollar que Donald Trump a délibérément provoquée pour doper les exportations américaines. Le billet vert a ainsi perdu 15% de sa valeur par rapport à l’euro, au yen et à la livre sterling. Trump compte aller encore lus loin puisque dans une de ses dernières allocutions, le tonitruant président américain a évoqué la nécessité de dévaluer encore davantage le dollar pour booster le commerce extérieur américain en le rendant plus compétitif en jouant sur les taux de change. Une dévaluation supplémentaire à brève échéance de 10% est, dores et déjà, évoquée par le secrétaire américain au Trésor, ne serait donc pas à exclure.

Ce serait évidemment un drame pour l’Algérie qui vend ses hydrocarbures en dollars et achète environ 54% des biens de consommation et matières premières qu’elle importe essentiellement d’Europe, en euros. Les 15% de dévaluation déjà subie par le dollar ont, à l’évidence, considérablement réduit son pouvoir d’achat en Europe et la dépréciation supplémentaire annoncée, ne fera qu’exacerber la pression sur le budget de l’Etat algérien. C’est un gros problème structurel que la gouvernement algérien ne pourra résoudre qu’en opérant un changement radical de partenaires commerciaux qui sont aujourd’hui à forte dominante européenne. Il faudra chercher de nouveaux partenaires dans les pays où l’industrie est performante et où la monnaie est faible. Ces pays ne se trouvent plus dans l’espace européen, la Grande Bretagne et le Japon dont les monnaies sont trop fortes, mais dans la zone dollar et, bien en entendu, les pays émergents dont la valeur de la monnaie est faible. Quand le dollar dérive aussi fortement, il n’y a d’autre issue que d’effectuer ses achats dans des pays où les monnaie sont faibles, à savoir, la Chine, la Russie, la  Turquie et certains pays émergents. Avec un dollar faible les USA pourront se ranger parmi les pays qui offrent des rapports qualité/prix plus avantageux que ceux que peuvent offrir les pays de l’Union Européenne pénalisés par un  euro top fort.

Mais le problème pour l’Algérie est qu’elle est signataire d’un accord de libre échange qui fait des pays signataires de l’accord ses fournisseurs privilégiés. Prés de 50% des nos importations proviennent ainsi de l’Europe où l’euro vaut aujourd’hui 1,25 dollar et certainement beaucoup plus lorsque que la dévaluation de 10% promise par Trump sera effective. Avec autant de dollars dépensés les quantités importées seront, à l’évidence, moindres. Pour les compenser il faudra dépenser plus de dollars à soustraire des recettes d’hydrocarbures et des réserves de change. Un processus d’appauvrissement du pays se trouve ainsi engagé au moment où les recettes d’hydrocarbures et les réserves de change sont en déclin.

Pour faire face à ce diktat du billet vert que les américains manipulent au gré de leurs seuls intérêts, d’aucuns suggèrent de faire pression sur les États-Unis au moyen du cartel Opep, pour que « l’oncle Sam » accepte qu’un pays exportateur de pétrole facture ses ventes d’or noir dans la monnaie qui convient le mieux. C’est une vielle requête que le cartel pétrolier en perte de vitesse  a évidemment peu de chance de faire aboutir, du fait que les pays qui le composent sont pour la plupart des alliés politiques des États-Unis qui, de surcroît, ont toujours eu une préférence pour les produits américains. Les seules réactions fortes que les USA puisse entendre ne peuvent provenir que de l’Union Européenne, de la Grande Bretagne et du Japon dont les monnaies ont beaucoup perdu de leurs compétitivités à cause des coups de boutoirs américains. Mais entre une Amérique qui a choisi de ne tenir compte que de ses intérêts et une Europe qui éprouve de graves difficultés à parler d’une seule voix, il est bien difficile d’inverser cette tendance à ne penser qu’à soi, d’autant plus que l’arrivée massive des conservateurs aux commandes des pays européens, fait pencher la balance beaucoup du coté des protectionnistes qui partagent les convictions de Trump. Il n’y a par ailleurs aucune réaction forte à attendre de la Grande Bretagne enlisée dans son Brexit et le Japon qui préfère ne pas se mesurer frontalement au géant américain.

Il faudra donc faire longtemps avec ces politiques de repli sur soi qui protègent les intérêts des uns sans se soucier de faire le malheur des autres. L’Algérie, comme tous les pays dont l’économie repose sur les seules ventes d’hydrocarbures obligatoirement libellées en dollars, en fera les frais en perdant une partie non négligeable de son pouvoir d’achat, notamment, sur les marchés européens où il achète l’écrasante majorité de ses biens de consommation. La riposte consiste à s’approvisionner là où le rapport qualité/prix est le plus avantageux à l’instar de la Chine et certains pays émergents, mais changer de fournisseurs requiert du temps et de l’organisation. Un dur challenge pour l’Algérie en pleine phase de transition politique que complique un choc pétrolier qui s’attarde au point de la rendre vulnérable aux moindres turbulences financières. Et les dévaluations présentes et à venir du dollar constituent autant de difficultés supplémentaires pour l’exerce budgétaire en cours qui pourrait, pour toutes ces raisons, atteindre un déficit record.

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