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Raif Mokretar Karroubi : « Si on ne prend pas de mesures économiques, d’autres le feront à notre place et avec leurs conditions »

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L’expert financier, Raif Mokretar Karroubi, a estimé urgent de prendre des mesures économiques et la mise en oeuvre de réformes qui tardent depuis deux décennies. « Si on ne prend pas de mesures économiques, d’autres le feront à notre place et avec leurs conditions » (référence au FMI), a-t-il déclaré, ce mercredi, sur les ondes de la radio Chaîne3.

« L’économie algérienne est en crise depuis quelques années, ce qui n’est plus un secret. Il est bien plus important de mettre en oeuvre des réformes qui ont énormément tardé, on les retarde depuis une à deux décennies, que de transiger sur des questions à caractère conjoncturel ou à court terme. Parce que, quelle que soit la personne ou l’institution qui devra mettre en oeuvre les réformes, le contenu et la prise de décision, et l’implémentation et la mise en oeuvre sont plus important. Tout le monde sait exactement ce qu’il y a à faire, mais très peu ont le courage managérial de prendre ces décisions. Parce qu’elles sont lourdes, elles marquent des ruptures avec le passé, et parce qu’elles ne sont pas forcément populaires », a-t-il expliqué.

Selon lui, la situation de l’Algérie en crise risque de se compliquer davantage avec l’épuisement des réserves de changes à l’horizon de 2022. « Pour un ensemble de raisons, il y a l’élément énergétique, les prix du pétrole baisse et la quantité produite aussi. Il y a un deuxième élément, c’est que la consommation énergétique interne de l’Algérie est en train d’augmenter. Dans quelques années, l’Algérie consommera plus d’hydrocarbures qu’elle n’en produit. C’est-à-dire, à un moment donné, il faudra faire un arbitrage entre les hydrocarbures qu’on produit et les hydrocarbures qu’on consomme. Quand on ajoute à cela le déficit de la balance commerciale, c’est-à-dire, les exportations qui n’arrivent plus à couvrir les importations qui sont incompressibles. Et il y a cette date butoir de 2022, il y a ce mur vers lequel nous avançons de plus en plus vite. Il est impératif de prendre les bonnes décisions et de les mettre en oeuvre aujourd’hui. »

Pour lui, la liste des réformes à mettre en oeuvre est connue et « c’est pédant de le redire », a-t-il estimé. « C’est la suppression de la loi 51/49 qui a massacré l’économie, la suppression du droit de préemption de l’Etat, c’est la réforme fiscale, l’augmentation de l’élargissement de l’assiette fiscale, l’amélioration du recouvrement fiscale, la mise en place d’un mécanisme de gestion du tau de change, la relance de l’agriculture, la relance du tourisme, la privatisation, aller petit à petit vers la convertibilité, avoir une politique monétaire déclarée, ouverte et avec des objectifs. C’est un ensemble de choses que nous connaissons tous, et tout le monde le rabâche depuis une vingtaine d’années », a-t-il détaillé.

« La seule chose qui manque c’est le courage décisionnel d’entreprendre ces réformes »

Selon lui , « la seule chose qui manque aujourd’hui, c’est le courage décisionnel d’entreprendre ces réformes. Parce que, ce ne sont pas des réformes qui vont apporter des bénéfices très très rapidement. Ce sont des choses dans les fruits vont s’étaler dans le temps, et pendant la période de transition, il va falloir gérer. Comment gérer? Mettre un filet social ciblé, et si on n’a pas le système statistiques pour le faire rapidement, il va falloir mettre en place un revenu universel pour gérer cette période de transitoire…etc ».

« C’est frustrant, parce que, les mesures sont connues, mais, on ne les prend pas », a-t-il dit. Pour Mokretar, « il se peut que c’est une myopie, et qu’on ne voit pas le mur vers le quel on se dirige, comme il se peut, que c’est une question d’horizon d’investissement politique », estimant qu’on a peur de prendre des mesures impopulaires.

« Soit on prend les mesures nous mêmes, soit d’autres les prendront à notre place »

« Il y a deux choses, soit on prend les mesures nous mêmes, soit d’autres les prendront à notre place », a affirmé l’expert financier en faisant référence au FMI. Il a expliqué que « la différence est que, dans le premier cas, on le fait avec nos conditions, mais, ce n’est pas sûr, car, l’idéal c’était de le faire au début des années 2000 quand il y avait l’embellie financière, là on aurait pu imposer nos conditions sur le marché international, mais là, dans la situation actuelle, tout le monde connait la macro-économie algérienne, tout le monde sait vers quels fondamentaux se dirige notre économie. Donc, même si, on le fait nous-mêmes, on n’a pas la même crédibilité et pouvoir de négociation ».

Et la deuxième façon de le faire, a-t-il poursuivi, « c’est quand on nous l’impose (le FMI), et la, ce n’est pas nous qui choisissons les conditions. Même ça, c’est mieux de le faire que, de continuer à avancer comme ça, ce qui est très dangereux, et les gens ne mesurent pas la portée de la chose ».

« Je crois que les gens ne sont pas conscients de la gravité de la situation », avant de préciser plus loin que « cela signifie gèle des salaires, blocage de la demande, licenciements… et implique des choses que nous avons déjà vécues et qu’on ne souhaite pas revivre », ajoute-t-il.

Il a relevé, qu’on ne sent pas de changement sur le plan économique du pays, pratiquement depuis 20 ans, sans nier, toutefois, la prise récemment de quelques « mesurettes » pour rationaliser les dépenses, en freinant des subventions, libéraliser les prix des carburants, mais, cela reste insuffisant par rapport à la gravité de la situation. Selon lui, la seule chose qui nous sauvera, c’est la libéralisation de l’acte d’investir. Il a relevé au passage qu’en Algérie, il est encore plus facile d’importer que d’investir et de produire.

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