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Les petites villes, grandes oubliées de l’urbanisation en Afrique

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En Afrique subsaharienne, la population urbaine a doublé depuis le milieu des années 1990. Elle a atteint 400 millions de personnes en 2016. Selon les experts, 40% de la population totale de la région réside dans une ville contre 31% en 2000. A l’ombre des grandes métropoles qui font l’objet de toutes les attentions, les petites villes et les villes secondaires sont les véritables moteurs de la croissance urbaine…

Les petites villes, moteur de la croissance urbaine : La croissance urbaine de l’Afrique, c’est d’abord à ces petites villes qu’on le doit. Alors que la proportion de la population urbaine résidant dans les villes principales est restée à peu près similaire sur les 20 dernières années, celle de ces petites villes a progressé. Les villes de plus d’un million d’habitants concentrent 34% de la population urbaine, tandis que les villes secondaires (entre 250 000 et 1 million d’habitants) en abritent 15%. Environ 51% des citadins africains vivent dans des villes de moins de 250 000 habitants.

Si les populations rurales rejoignent ces petites villes, c’est en raison de leur attrait en matière de services de base, notamment l’éducation. Car, il faut reconnaître qu’en dépit des difficultés qu’elle rencontre, la ville a des arguments à faire valoir. La pauvreté y est moins forte et ne touche que 22% des citadins contre 47% en zones rurales. Les villes comptent pour un tiers du produit intérieur brut du continent.

La concentration en un lieu unique du capital humain, des infrastructures et des entreprises constitue, à priori, un moteur de richesse. Néanmoins, les villes sont loin de tenir toutes les promesses liées à l’effet d’agglomération. En effet, le PNB/citadin en Afrique est de l’ordre de 1000 $. Or, à un niveau de développement démographique égal (40% de la population régionale), le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord (MENA) affichaient un PIB/habitant de 1800 $ tandis que l’Asie était à 3600 $ par habitant.

En outre, les difficultés que rencontrent les citadins du continent sont légion. En effet, le développement des infrastructures et des industries n’a pas suivi le niveau de concentration des populations. Si, chaque jour, 40 000 Africains sont attirés par les lumières de la ville, il faut également souligner que 60% de la population urbaine de l’Afrique subsaharienne réside dans les bidonvilles et que seulement 25% des citadins ont accès à l’eau potable. Preuve de la faiblesse relative de l’attractivité des villes africaines, la natalité porte plus la croissance démographique que la migration vers les villes.

Des difficultés liées à leur taille : Pour les petites villes, les difficultés sont encore plus grandes que dans les métropoles. En effet, la taille de ces dernières réduit les coûts liés à l’offre des services de base tandis que l’effectif, relativement réduit, des petites villes constituent  un frein au déploiement de ces services. Le coût par habitant des infrastructures (routes, approvisionnement en eau potable, électricité, écoles et centres de santé, entre autres) est plus élevé que dans les métropoles. Au-delà de ce challenge, les petites villes sont confrontées aux problèmes liés à la gestion foncière. Alors que l’optimisation de l’usage de l’espace requiert des institutions capables de dégager de grandes superficies pour la planification et le développement urbain ; on en trouve peu, surtout dans des systèmes décentralisés. Ces institutions devraient réunir sous un seul chapeau un ensemble de responsabilités dans la fourniture de services de base qui sont jusque-là réparties à travers plusieurs niveaux d’administration. En plus, les petites villes parviennent difficilement à réunir les financements et compétences nécessaires à la fourniture de services de base dont la viabilité économique n’est d’ailleurs pas toujours garantie pour des raisons d’échelle.

La mobilité reste également un défi des villes africaines. En effet, les villes sont déconnectées et peu denses. Elles tiennent plus d’une collection de quartiers que d’un ensemble pensé pour offrir la meilleure intégration possible. Ce péché originel fait exploser le coût de l’implantation des services de base, limite les opportunités d’emplois et grève les finances des ménages. Ainsi, pour 55% des ménages citadins d’Afrique subsaharienne, les charges sont plus élevées que pour des ménages d’un niveau de revenus équivalent dans d’autres pays affichant le même PIB/habitant. 

Plus de 50 % des déplacements se font à pied dans des villes comme Bamako, Conakry, Dakar, Douala et Niamey. Dans les petites villes, la résolution des problèmes de mobilité passe par une attention particulière à la gestion foncière dans un contexte où les propriétaires de seulement 10 % des terres dans ces régions sont clairement identifiés. Il faudra également que les dirigeants de ces villes s’attaquent à la transition de l’emploi agricole vers l’emploi non agricole, afin de favoriser la création de valeur. La valeur ajoutée de ces villes viendra également de la mise en place de solides connexions avec les zones rurales, par le biais d’infrastructures routières, et la création dans ces régions de débouchés pour la production agricole rurale. La mise en place d’unités d’agro-transformations permettra d’atteindre cet objectif tout en créant des emplois hors-ferme pour une population néo-citadine pour qui l’agriculture est restée l’activité principale, à côté du commerce de détail.

La faible importance des villes secondaires, un symptôme : Dernier maillon de l’intégration des villes africaines, les villes secondaires sont très peu présentes dans le paysage urbain africain. Cette situation traduit la faiblesse de l’activité industrielle en Afrique. En effet, ces espaces sont le réceptacle naturel du trop-plein d’activité industrielle des villes principales. Là où elles existent, on remarque une grande concentration d’industries traditionnelles comme les textiles et l’habillement. Or ces industries pèsent très peu dans le produit intérieur brut (PIB) des pays africains.  Mais si la situation est alarmante, elle pourrait néanmoins ne pas être désespérée. Ainsi, il faut, pour les Etats africains, adopter une politique de court terme et une autre de long terme. Ainsi, dans l’immédiat, il s’agirait de  concentrer les efforts sur trois axes majeurs, à savoir : renforcer les marchés fonciers, insister sur la planification urbaine et financer les infrastructures publiques. A long terme, il s’agit d’améliorer la productivité et réduire les externalités négatives tout en insistant sur l’investissement public.

Ecofin

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