AccueilInterviewsAbdelhamid Boudaoud, président du CNEA :« Le ministère de l’habitat ne peut,...

Abdelhamid Boudaoud, président du CNEA :« Le ministère de l’habitat ne peut, en lui seul, faire la conception d’une ville »

- Advertisement -

Dans cet entretien, le président du collège national des experts architectes, M.boudaoud réagit aux recommandations qui sont sorties du séminaire sur les villes algériennes. M.Boudaoud estime qu’il ne suffit pas de « pondre » des lois, le plus important est de former les gens sensés d’appliquer ces lois. Il considère aussi que l’aspect architectural est plus que primordial dans la conception d’une ville.   

Algérie-Eco : Le séminaire sur les villes algériennes, tenu mardi à Alger, s’est clôturé par une série de recommandations visant la promotion des cités existantes et la construction de celles à venir, en conformité avec le développement durable et l’écologie. D’abord que pensez-vous de cette rencontre ?

M.Boudaoud : je l’ai dis et je le répète, nos nouvelles villes n’ont de ville que le nom. La ville est comme une famille elle est composée et gérée par plusieurs acteurs. Le ministère de l’habitat ne peut en lui seul faire la conception d’une ville. Plusieurs ministères doivent êtres impliqués, ceux des collectivités locales, du tourisme etc… il faut dire que depuis l’indépendance, le pays n’a pas réalisé de véritables villes, mais des logements.

La différence c’est seulement au niveau de la taille. Car toutes nos villes se ressemblent, il n’ya pas de cachet architectural propre à une telle ou telle ville. Je donne comme exemple, les bâtiments construits ici à Alger sont les mêmes qui sont construits à Tizi-Ouzou, ou à Oran.  

Il faut reconnaitre que jusqu’au jour d’aujourd’hui, tous les ministres qui se sont succédé n’ont pas présenté de stratégie de la ville. Résultat : des constructions qui n’ont aucun sens ni sur le plan urbanistique ni sur le plan architectural. Il y a une part de responsabilité qui incombe aux autorités locales, mais aussi une autre au citoyen atteint du syndrome de la dalle. Aujourd’hui, lorsqu’un Algérien construit, il pense à ses enfants, à ses petits-enfants alors que la logique aurait été qu’il construise pour lui. L’Algérien n’a pas, malheureusement, cette culture d’aller vers l’architecte.

Parmi les recommandations de cette journée figure l’actualisation du cadre juridique régissant les aspects liés à la construction et l’entretien des villes, ainsi que la mise en place d’une stratégie nationale globale, élaborée sur la base de dialogue et de concertation, pour la promotion des cités. Quel commentaire faites-vous à ce sujet ?

D’abord je me pose cette question, qui a fait ces recommandations ? Ensuite je dirai qu’il y a des lois. L’arsenal juridique existe, malheureusement, il n’est pas appliqué. Il est vrai que l’architecte a sa part de responsabilité et tous les textes lui confèrent les prérogatives, mais sur le terrain, la réalité est tout autre. A-t-on vu à ce jour un directeur d’OPGI ou un P/APC disposer d’un consultant ou d’un conseiller architecte. Aussi, il ne suffit pas d’imposer des lois, mais il faut former les gens qui doivent appliquer ces lois.

Il faut savoir aussi que l’architecte serait très content lorsqu’il voit son produit réalisé. L’architecte fait souvent l’étude dans le respect des règles de l’art, mais l’usager la change une fois le permis de construire obtenu. Ce dernier profite du vide juridique qui existe sur ce sujet puisqu’il n’y a pas des textes clairs qui stipulent que l’architecte doit suivre la réalisation de l’auto constructeur.

On évoque aussi de nouvelles villes, mais pour réaliser une vraie ville, il nous faut 40 à 50 ans. Maintenant, il y a une nouvelle politique dans le cadre du programme du président de la République avec à la barre la construction d’un million de logements. La faille réside dans le fait que les collectivités locales ne jouent pas le jeu. Elles ne travaillent pas de concert avec les hommes de terrain, ne les consultent pas. Nous savons qu’il y a 1.541 communes et chaque commune devrait procéder au recensement de son patrimoine immobilier existant, neuf ou vétuste, achevé ou inachevé. C’est la meilleure manière, à mon avis, au ministère de l’Habitat de définir les besoins des citoyens en termes de logements. C’est à partir de là aussi qu’on pourra dire que le logement est parfait et a été réalisé dans les règles de l’art.

Autre recommandation qui attire l’attention, celle de l’implication de la société civile (les associations et les comités de quartiers) dans les actions à mener et l’ancrage de la culture citadine, notamment chez les enfants et les jeunes personnes, sont des impératifs pour la promotion des villes. Qu’en pensez-vous ?

Je ne pense rien, mais je me pose cette question. Nous sommes en 2018 et c’est maintenant que nous pensons à associer la société civile dans les actions à mener ? Il faut surtout penser à réaliser une cartographie des villes, leur taille et leurs besoins architecturaux. Une ville exige, pour sa construction, une étude précise élaborée en étroite collaboration entre experts, sociologues, politologues, architectes géologue, géomètre et ingénieurs. Tout ce monde se doit de s’unir pour réfléchir sur la meilleure manière à même de bâtir une ville digne de ce nom. Il faut également une étude qu’il faut présenter aux usagers et pourquoi pas la faire exposer à la population qui doit avoir, elle aussi, un avis. Malheureusement ce qui n’est pas le cas actuellement. Les études sont bâclées et  Les réalisations prennent beaucoup de temps.  

Quelles sont les prochaines activités du collège national des experts architectes ?

Nous préparons une rencontre avec l’ordre des experts des géomètres, qui va se tenir en mars, et ça sera aussi une occasion pour parler justement de la ville. Parce que comme j’ai dis, les activités se complètent, il y a le géologue, le géomètre et l’architecte qui sont appelés à travailler en étroite collaboration.

Articles associés

Fil d'actualité

Articles de la semaine