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Faute de navires algériens: la presque totalité du fret maritime est assurée par armateurs étrangers

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L’Algérie est connue des milieux d’affaires pour le fait de, non seulement, importer l’essentiel de ses produits de subsistance, mais aussi et surtout, de les transporter essentiellement au moyen de navires étrangers. Sa vulnérabilité aux coûts et aux états d’âme des grandes compagnies maritimes internationales pourrait de ce fait s’avérer très dangereuse pour sa souveraineté, notamment, en cas de grave conflit géopolitique.  
Étrangement, l’Algérie qui dispose d’une façade maritime de plus de 1600 km, ne possède en tout et pour que d’une dizaine de navires marchands gérés par une entreprise monopoliste d’État, la Compagnie Nationale de Navigation (CNAN) en l’occurrence. Empêtrée depuis plusieurs années dans d’insolubles problèmes financiers et managériaux, ses performances en matière de fret sont, non seulement, peu brillantes mais en constant déclin.
Sans jamais y être parvenus, les quatre derniers gouvernements ont tous pensé pouvoir la sortir d’affaire en l’aidant à acquérir à brève échéance une vingtaine de nouveaux navires, mais le renforcement projeté se résume à l’acquisition d’à peine quatre bateaux de moyenne envergure. La CNAN n’assure de ce fait qu’un à deux pour cent du fret national. C’est à ce squelettique monopole que les autorités politiques algériennes tiennent aujourd’hui  à donner le qualificatif de «pavillon national» pour justifier son maintien en vie en dépit d’un bilan comptable désastreux. En réalité aucun geste fort (assainissement financier et recapitalisation, accès aux crédits bancaires etc.) ne sera fait en sa direction pour lui assurer une remise à flot durable. Aucun promoteur algérien n’ayant été autorisé par ailleurs à créer une compagnie privée susceptible concurrencer la CNAN, les armateurs et compagnies de navigation étrangers (CMA/CGM, Maersk, MSCA, GATMA, WALSHIP, GOFAST, CHINA SHIPPING etc.) ont fini par accaparer l’essentiel du fret maritime algérien qui avait pris un essor considérable à la faveur du boum des importations de ces dix dernières années.  Ces derniers amasseraient ainsi entre ainsi entre 5 et 6 milliards de dollars de chaque année, selon diverses estimations qui restent à vérifier.
Autant de faits et de chiffres qui donnent la mesure de l’extrême vulnérabilité de l’Algérie qui, non seulement ne parvient pas à produire ses moyens de subsistance, mais, pire encore, à prendre en charge par ses propres moyens l’acheminement des marchandises qu’elle importe massivement. Un embargo exercé, pour une raison ou autre, par des armateurs étrangers peut en effet faire basculer du jour au lendemain le destin du pays en provoquant notamment des pénuries de produits de premières nécessité susceptibles d’embraser le front social.
On se pose alors la question de savoir comment un pays qui disposait de 80 navires dans les années 70 en est arrivé à n’avoir aujourd’hui qu’une dizaine de bateaux en mesure naviguer sur les eaux territoriales internationales.
La réponse est évidemment dans le maintien têtu du monopole du transport maritime de marchandises que l’Etat avait confié en 1971 à la Compagnie nationale de navigation (CNAN) en dépit de la mise à la réforme, en 1997, d’une trentaine de vieux rafiots  qu’il n’a pour diverses raisons, jamais pris le soin de remplacer. La privatisation de la CNAN avait été certes à l’ordre du jour au milieu des années 2000, mais toutes les initiatives qui devaient être prises dans ce sens furent malheureusement torpillées. Vendus à la casse à des hommes d’affaires véreux les navires réformés n’ont, à l’évidence, pas rapporté grand-chose au trésor algérien.
Longtemps contrainte au statu quo, la CNAN est progressivement rentrée dans un état de délabrement si grave que son redressement requiert aujourd’hui, non seulement, des moyens financiers gigantesques mais aussi une remise à plat de tout son système de gestion. Ce qui est tout à fait improbable dans l’état actuel de nos finances publiques. Incapable de régler les frais de maintenance de ses bateaux vieillissants, ces derniers seront souvent saisis par les tribunaux internationaux  ou interdits de naviguer en dehors de nos limites territoriales, donnant au pavillon algérien une piètre image de marque à l’étranger.
Pratiquement toutes les filiales du groupe CNAN sont aujourd’hui encore en difficulté en raison, notamment, des lourdes dettes qu’elles continuent à traîner et des déficiences managériales qui hypothèquent chaque année un peu plus leur avenir. Mais en dépit de tous ces aléas la CNAN est aujourd’hui la seule compagnie que le gouvernement algérien autorise à posséder des navires marchands.
Un décret exécutif publié en 2010 a certes autorisé des promoteurs autres que la CNAN à acquérir des bateaux destinés au transport de marchandises, mais faute de textes d’application et de conditions favorables à cet investissement lourd et risqué, les hommes d’affaires pourtant nombreux à s’y intéresser, hésitent aujourd’hui encore, à s’y engager.
En attendant que le privé algérien soit autorisé à investir dans le créneau de l’armement, il est à notre avis, nécessaire que l’Etat consente au moins à renforcer la capacité de transport de la CNAN par l’acquisition aussi rapide que possible d’au minimum une trentaine de navires et cargos pour remettre la compagnie à un niveau de performance acceptable. Quatre autres navires commandés récemment commandés devraient renforcer quelque peu la flotte actuelle mais au-delà l’incertitude plane pour cause de déclin de nos ressources en devises.
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