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Tinzaouatine : Ce qui s’est passé

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Située à l’extrême sud de l’Algérie, Tinzaouatine, la commune frontalière avec le Mali, à plus de 500 km au sud-ouest du chef-lieu de la wilaya de Tamanrasset, a été hier (lundi) le théâtre de violents affrontements entre des jeunes de cette ville et les gardes frontières. Un homme est d’ailleurs décédé touché par une balle lors de la manifestation qui a viré à l’émeute.

Les tirs de sommation de gardes frontières ont blessé trois citoyens et causé la mort d’un autre parmi les jeunes, selon le témoignage d’un notable de la région, cité par El Watan, qui a précisé que des blessés parmi les gardes frontières ont été déplorés.

Sur les nombreuses images et vidéos partagées depuis la matinée d’hier sur les réseaux sociaux, on peut constater la violence des affrontements. Sur certaines images, on peut même voir des citoyens touchés par balles et sur une vidéo, on peut voir un homme gésir par terre.

Sur les réseaux sociaux, les internautes ont exprimé leur soutien aux citoyens de Tinzaouatine en accusant l’armée de bavure et de tirer à balles réelles sur des manifestants désarmés.

Communiqué du Ministère de la défense

Le ministère de la défense nationale (MDN) a réagi dans la soirée de lundi pour démentir ces informations relayées mettant en cause l’ANP.

Dans un communiqué rendu public, le MDN a démenti « formellement » les « informations incitatives colportées via les réseaux sociaux, le 15 juin 2020, accusant des éléments de l’Armée Nationale Populaire d’avoir ouvert le feu sur des individus dans la localité frontalière malienne d’Ikhraben, limitrophe de la Commune de Tinzaouatine en 6ème Région Militaire ».

Le MDN a qualifié ces infirmations « d’allégations infondées, et affirme que ces événements se rapportent à une tentative, menée par des personnes connues pour leurs activités suspectées dans la contrebande et le crime organisé, visant à détériorer le mur de sécurisation, en appelant les habitants à la violence et à la manifestation, dans une manœuvre visant à libérer l’étreinte sur leurs intérêts dans la région ».

En effet, selon la même source, « au moment où les éléments des Garde-frontières ont intervenu pour apaiser la situation, des coups de feu inconnus ont été ouverts depuis Ikhraben en direction des positions de nos Garde-frontières, ayant touché un individu parmi la foule, qui a été immédiatement évacué par les Garde-frontières pour être pris en charge par les services de santé, mais qui a succombé malheureusement à ses blessures ».

Ce qui s’est passé

De nombreuses sources locales ont décrit au journal El Watan « de violentes émeutes après la tentative des citoyens de la ville d’arracher les barbelés installés par les unités de l’armée depuis quelques jours séparant la ville de Tinzaouatine de celle qui porte le même nom du côté malien. Fermée depuis des années, la frontière entre les deux villes n’était pas hermétique puisque des passages permettaient les échanges entre les familles des deux côtés », ont-elles expliqué par téléphone à la même source qui précise que « depuis quelques semaines, les autorités sécuritaires ont renforcé ce dispositif par des barbelés. Ce qui a suscité la colère de la population. »

« Tous nos appels n’ont servi à rien. Hier, vers 9h00, des groupes de jeunes se sont rués sur la frontière pour arracher les fils barbelés, suscitant les premiers tirs de sommation des gardes-frontières. Il y a eu trois blessés, dont un qui a rendu l’âme du côté des jeunes, et d’autres dont on ne connait pas le nombre du côté des gardes-frontières », a témoigné un notable de la région au même journal.

De son côté, le maire de Tinzaouatine, M. Mansouri, joint lui aussi par téléphone a expliqué à  El Watan : « Tout le monde sait que de nombreuses familles sont partagées entre les deux villes que sépare l’oued. De l’autre côté, il n’y a rien, ni eau, ni produits alimentaires, ni les moindres conditions de vie. Il est tout à fait normal que les familles s’entraident. Elles viennent s’approvisionner à Tinzaouatine et repartent. »

Selon le maire de Tinzaouatine : « La décision d’installer des fils barbelés aurait dû être prise en concertation avec les notables de la région afin qu’ils puissent convaincre la population, ou à la limite trouver des solutions alternatives à la fermeture. C’est ce qui a poussé les jeunes à sortir ce matin (hier) pour arracher les barbelés. La confrontation avec les gardes-frontières était inévitable. Les premiers tirs de sommation n’ont pas fait reculer la foule. »

« La situation a dérapé avec la première victime, un jeune blessé par balle. Une pluie de pierres et de projectiles s’est abattue sur les gardes-frontières, occasionnant des blessures à quelques-uns d’entre eux », a précisé M. Mansour en exprimant son « regret » face à de « tels dérapages ». Le maire de Tinzaouatine espère une « intervention rapide des autorités afin de prendre en charge les préoccupations » de la population » déjà exprimées à maintes reprises ».

Alerte🇩🇿 عاجل جدا
15/06:
La situation s’embrase à Tin Zaouatine à l’extrême sud dans la wilaya de Tmanrasset.
احتقان كبير تعيشه مدينة تين زاواتين في أقصى الجنوب الجزائري. pic.twitter.com/WqjVIBiAJJ

Des représentants de la société civile ont interpellé le wali de Tamanrasset

Des représentants de la société civile de la région ont interpellé le 11 juin le wali de Tamanrasset auquel ils ont remis une liste de revendications, parmi lesquelles figurait « la levée des barrières et fils barbelés installés autour de la ville, la coupant de l’oued, source d’approvisionnement en eau, la mise en place de points d’accès aux éleveurs, et surtout l’ouverture de canaux de communication entre les notables et les autorités sécuritaires », a rappelé la même source.

El Watan a également rappelé qu’il y a quelques semaines, sept députés des wilayas de Tamanrasset, Illizi et Adrar ont interpellé le Premier ministre sur « la nécessité d’aller vers un plan de régulation des zones fermées par des barbelés, de mettre en place des passages pour les éleveurs et les agriculteurs et de faciliter l’accès à la ressource hydrique, ayant pour but, plaident-ils, d’assurer la protection des frontières, des biens et des populations et de faire face aux menaces terroristes ».

« Les stratégies sécuritaires des wilayas frontalières doivent être en adéquation avec la vie des populations qui vivent sur la bande frontalière », ont estimé ces députés.

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